Nouveau v379
Mission encre noire

Émission du 29 septembre 2020

Mission encre noire Tome 29 Chapitre 335. École pour filles par Ariane Lessard paru en 2020 aux éditions La mèche. Plusieurs élèves et leurs institutrices sont pris par la neige six mois par année dans un pensionnat pour jeunes filles, isolé dans une vaste forêt. Dans un décor angoissant, les unes et les autres, certaines plus vieilles, d'autres disparues...accumulent les savoirs. Chacune pose sa voix, page après page, pour composer un chant pluriel. Chemin faisant, les pièces orales composent un fascinant jeu d'écriture, en forme de rebus circulaire, autour du cycle des saisons. Parfois caresses, tantôt gifles, les mots que l'autrice donnent à entendre flattent autant qu'ils procurent des frissons à l'échine. Ariane Lessard n'a pas son pareil pour harmoniser les différents styles de parole d'une oeuvre chorale qui célèbre l'écologie, le féminisme et les savoirs occultes. Entre colère et violence, c'est la vie qui veut éclore dans ce couvent fermé comme un poing. Rendu à l'âge de la puberté, de ces jeunes filles qui aiment habiter le silence où affirmer de rompre avec les bonnes manières, se dégage un exercice de remise en question des choix et des limites, dans un univers extérieur menaçant. L'autrice se prête au jeu de ces multiples visages, autant de miroirs, qui malgré les failles se refusent à briser. Préparez-vous à descendre à la cave d'un univers ensorcelant où la vérité sourd de dalles blanches dans une langue furieusement habitée. je reçois Arianne Lessard, ce soir, à Mission encre noire. Extrait: « Je m'amuse à suivre la trace laissée par Jeanne au sortir de la grande salle. Dame Angoisse me tend la serpillière. Ce n'est pas à moi de ramasser ses gouttes. L'eau rouge coule sur le carrelage. L'eau rouge se terre entre les craques du plancher. J'ai gardé ma queue en tissu, l'ai ramenée à ma chambre sous le toit, l'ai roulée en boule et l'ai glissée dans mon pantalon. Si les plus vieilles n'y étaient pas, ce serait moi le roi.» Les Rosemonteries de Sébastien Ste-Croix Dubé paru en 2020 aux éditions Triptyque dans la collection Novella. Que dire de l'ambition d'un jour de St-jean d'Adam, de se glisser dans son hamac avec une bière dans le gosier, des écouteurs et un Dostoïesvski ? Si ce n'est qu'une pièce défectueuse pour réparer un fermenteur à Mabrasserie va diablement changer sa routine. Soixante-cinq jours de travail non-stop dans la vie d'un brasseur de bière qui carbure à la cervoise et à une galaxie de pilules en tout genre, ça use. Gagner sa vie en ruinant son couple n'est pas si payant. Effondré, Adam s'invite alors en enfer, sous le soleil tapant dans dédale des rues rosemontoises à la recherche de la pièce manquante ou de lui-même. Dans la moiteur d'un quartier de Montréal en pleine mutation, l'auteur nous embringue dans une dérive gonzoesque, en gougounes, à travers le regard avisé de son personnage principal. Prêt pour un road-trip sous acide au coeur du quartier Rosemont ? J'accueille Sébastien Ste-Croix Dubé à Mission encre noire. Extrait: « Je monte jusqu'à la rue Beaubien pour me rendre au parc Molson. Ça me donne l'impression d'aller dans la bonne direction. Je m'effondre sur une table de pique-nique. Ici, les festivités cessent peu à peu, il reste seulement quelques âmes errantes qui gueulent ou se frenchent. Pas loin, un gars crie bonne Saint-Jean, tabarnaque !, je pense d'abord que c'est dirigé contre moi, qu'on m'accuse. Mais non, il poursuit son chemin en chancelant et en hurlant. De l'autre côté de la rue, le Cinéma Beaubien expose sa tête lumineuse. Les ampoules font une chorégraphie bizarre autour des affiches ; chaque lumière y va de sa petite danse improvisée ; chaque lumière est une émotion. Le riz frit, c'était ton plat préféré. Quand t'as appris que t'allais crever d'un cancer, t'es venu me voir. Tu souriais, mon crisse. Tu disais que t'avais même pas peur. Que de toute façon, il fallait juste s'assurer de faire ce qu'on aime avec les gens qu'on aime et de pas gaspiller le temps qu'on a.»

Feuille de route

Tous les épisodes

Mission encre noire 07 décembre
Émission du 6 décembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 397. Un homme et ses chiens par Marc Séguin paru en 2022 aux éditions Leméac. Que faut-il donc pour qu'un homme se dise presque heureux ? Dans sa vie, il a eu ses chiens, Mujo son premier, il avait sept ans, son confident. Easter, Goose et Maya suivront. Dès ses 4 ans, il a souhaité la fin du monde. Ne sachant trop quoi faire de cette euphorie soudaine, il détruit ses modèles complexes pour pouvoir les reconstruire. Plus tard, il fuira le monde et ses conventions à travers les drogues, puis les livres. Il aura connu l’amour, à plusieurs reprises, malgré sa sauvagerie. Sans cynisme, il constatera son incapacité à partager son quotidien bien longtemps. Ce qu'il cherche est plus grand que soi, une façon de vivre qui pourrait taire sa colère intérieure. Il restera à Anticosti plusieurs années, puis sur l’île aux Naufrages. Il deviendra guide de chasse, avec ses chiens, pour accompagner de riches américains, des français ou des anglais. Néanmoins, la question demeure: que faire de ses forces obscures qui le bousculent ? Comment apaiser ses rapports amoureux ? Marc Séguin nous présente le portrait tout en nuances d’un homme qui s’inscrit en rupture de la société. Lui qui aimerait tant ajouter un chapitre de bonheur véritable à l’histoire de sa vie, même s’il juge le quotidien définitivement trop triste. Pourtant si l’humanité court à sa perte, à quoi cela sert-il de vouloir encore aimer, pour de vrai, en grand, jusqu’à la douleur peut-être? Si par un ciel clair, il est encore possible de voir des étoiles filantes aujourd’hui, parfois elle nous attire comme un mauvais rêve, loin du vide. Pour nous signifier que nous ne sommes pas seul au monde. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire Marc Séguin.
60 min
Mission encre noire 30 novembre
Émission du 29 novembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 396. Les allongées par Jennifer Bélanger et Martine Delvaux paru en 2022 aux éditions Héliotrope. Les deux autrices confessent être prise en otage par des douleurs et des fatigues chroniques, si brutales parfois, à vous laisser le souffle court. Comment témoigner de ce qui échappe au regard, de ce qui ne se partage pas,voire jamais ? À quoi ressemble le monde vu d’un lit, cet étrange objet, lieu grave s’il en est, lieu de naissance, de passion, de désir, de mort, de souffrance et aussi d’oubli. Car voilà, comment peux-t-on avoir une vie quand on la subit couchée? Martine Delvaux et Jennifer Bélanger s’entourent d’autres femmes, écrivaines, artistes, amies, mères, filles, amantes et soignantes pour rendre hommage à toutes celles qui plient sans doute un peu plus chaque jour sous le poids de leur plaies et blessures ; les accidentées, les insomniaques, les survivantes et qu’on invisibilise encore trop souvent. Les voix de ces femmes qui luttent, se rebellent, s’arc-boutent devant un monde qui préfère les reléguer aux rôles de paresseuses, d’hystériques ou de martyres cinglent les pages de ce court essai. Même si leurs corps les obligent à ralentir, les deux autrices ne renoncent surtout pas à redonner une voix à celles laissées pour mortes. Pour toute une famille élargie de résistantes, il reste le rêve et l’écriture d’autres récits, j’accueille, à Mission encre noire, Jennifer Bélanger et Martine Delvaux.
60 min
Mission encre noire 23 novembre
Émission du 22 novembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 395. J’étais un héros de Sophie Bienvenu paru en 2022 aux éditions Le Cheval d’août. Yvan, 62 ans et Miche, sa colocataire-sa blonde, se retrouvent démuni.e.s aux urgences d’un hôpital pour recevoir un diagnostic sans appel. Yvan a passé sa vie à se détruire, Miche aussi d’ailleurs, étant devenue alcoolique comme lui. Il est tout seul, il l’a toujours été, sa vie aura été ça : un amas d’affaire ratées et d’occasions perdues. Ça fait 20 ans qu’il n’a pas revue Gabrielle, sa fille. Il ne lui a même jamais donner son numéro de téléphone.Que pourraient-ils se dire de toute manière? Pourtant dans le temps, il était son héros. C'est lui qui le dit. Son rire d'enfant faisait de lui un surhomme. Heureusement, aujourd'hui il lui reste encore un chat trouvé dans les poubelles et Miche qui l'ennuie. Il fait ce qui lui tente l'animal, il est libre, il est maître de son destin. Ça lui plaît ça, à Yvan. Rien n'est moins vrai. Sophie Bienvenu nous dévoile le portrait d’un homme blanc, d’un baby boomer, prisonnier des rôles qu’il s’est imposé. Il vient d'une génération qui se sait malhabile avec les émotions et qui préfère encore les silences ou les baisers de feu de l’ivresse pour colmater les cicatrices du passé. Enfant quand on a le goût de pleurer devant Lassie, de jouer avec les petites filles à la poupée, et, plus tard, de vouloir porter des pantalons rouges comme Bowie, ça marque quand même son homme. Que reste-t-il de tout cela au final? Comment enfin prendre la parole avec sa fille? Peut-on pardonner après si longtemps? Je reçois Sophie Bienvenu, ce soir à Mission encre noire.
60 min
Mission encre noire 09 novembre
Émission du 8 novembre 2022
Mission encre noire Tome 36, Chapitre 394. Niagara par Catherine Mavrikakis paru en 2022 aux éditions Héliotrope. Ici nous sommes en présence de la voix de la narratrice au pied des célèbres chutes, l'eau et ses remous se déchaînent. Elle guette encore au bord du parapet l’apparition improbable de la silhouette fantomatique de sa mère, morte depuis belle lurette, dérivant au long des rives des grands fleuves du continent américain. Car voilà, ce deuil, éveille en elle, un rêve insensé, que ce soit à partir des photos de son enfance, lors d’une première visite à Niagara en 1964, ou bien à la suite d'une citation de marguerite Duras, la narratrice voit encore et encore, le corps aimant disparaître sous les écumes et rejoindre les berges du Mississippi. Marquée par le séisme provoqué par cette perte, elle y puise une inspiration inédite, qui, sur le modèle de François-René de Châteaubriant, ou est-ce peut-être Flaubert, Mallarmé ou même Jeff Buckley et bien d’autres, lui permet d’élaborer de véritables Mémoires d’outre-tombe. Se dessine, alors, sous la plume espiègle et badine de l’autrice, un portrait tout aussi jouissif que douloureux, de ce qui fonde, il faut bien se l’avouer, un héritage littéraire. Plouf, donc, sillonnant le territoire nord américain des songes, Catherine Mavrikakis s’amuse à dégringoler ces chutes, car c’est à Niagara qu’elle contracté la maladie de la mort. De quoi s’agit-il au juste? J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Catherine Mavrikakis.
60 min
Mission encre noire 18 octobre
Émission du 18 octobre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 393. Candy par Benjamin Gagnon Chainey paru en 2022 aux éditions Héliotrope. Lorsque la nuit se drape de faux-semblants, Candy, drag queen, multiplie les numéros au cabaret Rocambole à Villecresnes. Dans sa loge, elle se prépare à la gloire, à danser et à chanter en pleine lumière. Thierry meurt un peu plus chaque nuit pour laisser éclore la glamoureuse étoile qui naît sous les yeux ébahis de la foule en délire. Et si le cabaret commence à bander, c’est pour son Mathurin qu’elle tremble. C’est pour lui qu’elle chante, c’est pour lui qu’elle va fuir ces bas-fonds. Mathurin et sa femme fatale vont se déguiser en courant d’air et mettre le cap sur le paradis en talons haut. Une ombre distordue les attend, cependant, au détour d’une rue. Une hideuse vieillarde, porteuse de malheur, qui ricane et toussote. Ils commettront leur premier meurtre. Déclarés coupables, les amants briseront pourtant leur chaîne et ils s’uniront pour le pire car l’enfer est pavé de bonnes intentions. Conte d’amour pour adultes et vacciné.e.s, cette cavale du tonnerre déroule son tapis rouge avec style et emphase, dans les plis duquel, il se pourrait, que l’éternelle Divine de Jean Genet se prenne les pieds. Candy, la vie contée d’une Notre-Dame-des-Fleurs enceinte d’un fruit d’amour impossible, devient un fascinant lieu de passages entre les identités, la réalité et la fantasmagorie. En route, donc, pour l’Eden. Faites gicler strass et paillettes, j’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Benjamin Gagnon Chainey.
60 min
2
3
4
5
6