Nouveau v379
Mission encre noire

Émission du 22 septembre 2020

Mission encre noire Tome 29 Chapitre 334. Burgundy de Mélanie Michaud paru en 2020 aux éditions La mèche. Lorsque l'on grandit à Burgundy, il faut savoir rêver à une autre vie, plus belle, «comme une surface en marbre toute polie qui shine». Petite Bourgogne est ce quartier de Montréal situé entre Saint-Henri et Pointe-Saint-Charles. Pour l'autrice, c'est clair, c'est un mauvais souvenir. Et puis, les années 80 et 90, c'était laid, les pires moments de sa vie, la laideur et la violence sont des monnaies courantes, dans la rue comme chez elle. Même s'il y a des limites à camoufler du pas beau, Mélanie Michaud, se saisit de l'écriture, pour raconter son histoire à coeur percé, celle d'un des derniers quartiers populaire de Montréal, celle d'une langue de la rue, celle d'un «air d'aller» qui disparaît. Drôles, glaçants, parfois poignants, ces récits d'une vie maganée sont punchés à souhait et coupants comme la lame d'une femme commando bandée. Je reçois Mélanie Michaud, ce soir, à Mission encre noire.  Extrait: « J'ignorai pourquoi il ne fallait pas que je devienne une catin, une guidoune, une salope, une pute (ou tout autre synonyme de guédaille), malgré que les hommes aimaient ça. Et que mon bonheur reposait sur la validation de mon corps par les hommes. J'imagine que j'allais comprendre quand j'aurai des seins pis que les hommes m'aimeraient. Ou me désireraient. Ou, je sais pas, tireraient du plaisir de moi ou de mon corps. C'est contradictoire, un couple, on dirait. Je trouvais ça bizarre que personne ne se souciait que ces femmes-là, c'était du vrai monde. La fille était quelqu'un derrière ses gros seins. Les hommes semblaient décider de tout: au gouvernement, dans les maisons, dans les jobs d'adultes pis même par rapport aux femmes pis à ce qu'elles doivent avoir l'air. C'étaient eux, les chanceux, pis nous autres fallait les servir, pas juste avec de la bouffe, mais avec nos sexes pis toutes. Faque il me fallait devenir quoi ? Je ne voulais pas servir un homme, ni avec mes appareils de cuisine ni avec mes appareils reproducteurs. Faque j'ai décidé que j'allais devenir une superhéroïne en string pis que j'allais libérer les guédailles pis les habiller, avec du linge qui ne viendrait pas de l'Armée du Salut. On ressemblerait toutes à Cyndi Lauper, on aurait du fun pis les messieurs pas fins auraient tous peur de nous.» Comment (et pourquoi) je suis devenue végane par Eve-Marie Gingras avec une préface d'Élise Desaulniers paru en 2020 aux éditions Écosociété. La bédéiste Eve-Marie Gingras nous fait partager son cheminement vers le véganisme alors qu'elle manipule du boeuf haché. Soudainement ce qu'elle tient dans ses mains lui paraît froid et mort. Elle se demande, nauséeuse, QUI, elle a touché et non plus QUOI. Se déroule alors, au fil des pages, une série de réflexions sur notre rapport à l'animal, mais aussi sur des problèmes plus larges de choix de sociétés et de consommation de viande. Richement documenté, cet album s'inspire des expériences concrètes de l'autrice. Loin de verser dans un angélisme buccolique, la narratrice se questionne ainsi sur le bien-être et le droit animal, l'antispécisme, le lien avec le féminisme et la dissonance cognitive, et bien entendu sur le bien-fondé de nos valeurs éthiques. Profondément empathique à l'égard de la cause animale, ce livre est une formidable découverte graphique qui diffuse une information fondamentale, eu égard aux nombreux défis environnementaux qui nous attendent à l'avenir. Eve-Marie Gingras est invitée à Mission encre noire. Extrait: « Tout ça pour dire que le patriarcat fait vraiment du mal à tout le monde, physiquement et mentalement, en nous cantonnant dans des rôles préétablis, rigides et inconfortables. Il est temps qu'on cesse d'y participer et qu'on passe à autre chose, tout le monde ensemble. Le véganisme ne peut certainement pas régler tous les problèmes auxquels on fait face, mais, comme les autres mouvements progressistes, il contribue efficacement à remettre en questions les discours dominants oppressifs. Ça me plaît ! D'ailleurs, c'est en devenant végane que j'ai pris connaissances de l'ampleur de notre domination sur les êtres animaux. leur sujétion est telle qu'elle nous est souvent invisible, malgré son omniprésence. Elle est dans nos divertissements, nos vêtements, nos cosmétiques, nos produits nettoyants, notre nourriture...Sans que tout cela ne soit nécessaire.»  

Feuille de route

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Mission encre noire 07 décembre
Émission du 6 décembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 397. Un homme et ses chiens par Marc Séguin paru en 2022 aux éditions Leméac. Que faut-il donc pour qu'un homme se dise presque heureux ? Dans sa vie, il a eu ses chiens, Mujo son premier, il avait sept ans, son confident. Easter, Goose et Maya suivront. Dès ses 4 ans, il a souhaité la fin du monde. Ne sachant trop quoi faire de cette euphorie soudaine, il détruit ses modèles complexes pour pouvoir les reconstruire. Plus tard, il fuira le monde et ses conventions à travers les drogues, puis les livres. Il aura connu l’amour, à plusieurs reprises, malgré sa sauvagerie. Sans cynisme, il constatera son incapacité à partager son quotidien bien longtemps. Ce qu'il cherche est plus grand que soi, une façon de vivre qui pourrait taire sa colère intérieure. Il restera à Anticosti plusieurs années, puis sur l’île aux Naufrages. Il deviendra guide de chasse, avec ses chiens, pour accompagner de riches américains, des français ou des anglais. Néanmoins, la question demeure: que faire de ses forces obscures qui le bousculent ? Comment apaiser ses rapports amoureux ? Marc Séguin nous présente le portrait tout en nuances d’un homme qui s’inscrit en rupture de la société. Lui qui aimerait tant ajouter un chapitre de bonheur véritable à l’histoire de sa vie, même s’il juge le quotidien définitivement trop triste. Pourtant si l’humanité court à sa perte, à quoi cela sert-il de vouloir encore aimer, pour de vrai, en grand, jusqu’à la douleur peut-être? Si par un ciel clair, il est encore possible de voir des étoiles filantes aujourd’hui, parfois elle nous attire comme un mauvais rêve, loin du vide. Pour nous signifier que nous ne sommes pas seul au monde. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire Marc Séguin.
60 min
Mission encre noire 30 novembre
Émission du 29 novembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 396. Les allongées par Jennifer Bélanger et Martine Delvaux paru en 2022 aux éditions Héliotrope. Les deux autrices confessent être prise en otage par des douleurs et des fatigues chroniques, si brutales parfois, à vous laisser le souffle court. Comment témoigner de ce qui échappe au regard, de ce qui ne se partage pas,voire jamais ? À quoi ressemble le monde vu d’un lit, cet étrange objet, lieu grave s’il en est, lieu de naissance, de passion, de désir, de mort, de souffrance et aussi d’oubli. Car voilà, comment peux-t-on avoir une vie quand on la subit couchée? Martine Delvaux et Jennifer Bélanger s’entourent d’autres femmes, écrivaines, artistes, amies, mères, filles, amantes et soignantes pour rendre hommage à toutes celles qui plient sans doute un peu plus chaque jour sous le poids de leur plaies et blessures ; les accidentées, les insomniaques, les survivantes et qu’on invisibilise encore trop souvent. Les voix de ces femmes qui luttent, se rebellent, s’arc-boutent devant un monde qui préfère les reléguer aux rôles de paresseuses, d’hystériques ou de martyres cinglent les pages de ce court essai. Même si leurs corps les obligent à ralentir, les deux autrices ne renoncent surtout pas à redonner une voix à celles laissées pour mortes. Pour toute une famille élargie de résistantes, il reste le rêve et l’écriture d’autres récits, j’accueille, à Mission encre noire, Jennifer Bélanger et Martine Delvaux.
60 min
Mission encre noire 23 novembre
Émission du 22 novembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 395. J’étais un héros de Sophie Bienvenu paru en 2022 aux éditions Le Cheval d’août. Yvan, 62 ans et Miche, sa colocataire-sa blonde, se retrouvent démuni.e.s aux urgences d’un hôpital pour recevoir un diagnostic sans appel. Yvan a passé sa vie à se détruire, Miche aussi d’ailleurs, étant devenue alcoolique comme lui. Il est tout seul, il l’a toujours été, sa vie aura été ça : un amas d’affaire ratées et d’occasions perdues. Ça fait 20 ans qu’il n’a pas revue Gabrielle, sa fille. Il ne lui a même jamais donner son numéro de téléphone.Que pourraient-ils se dire de toute manière? Pourtant dans le temps, il était son héros. C'est lui qui le dit. Son rire d'enfant faisait de lui un surhomme. Heureusement, aujourd'hui il lui reste encore un chat trouvé dans les poubelles et Miche qui l'ennuie. Il fait ce qui lui tente l'animal, il est libre, il est maître de son destin. Ça lui plaît ça, à Yvan. Rien n'est moins vrai. Sophie Bienvenu nous dévoile le portrait d’un homme blanc, d’un baby boomer, prisonnier des rôles qu’il s’est imposé. Il vient d'une génération qui se sait malhabile avec les émotions et qui préfère encore les silences ou les baisers de feu de l’ivresse pour colmater les cicatrices du passé. Enfant quand on a le goût de pleurer devant Lassie, de jouer avec les petites filles à la poupée, et, plus tard, de vouloir porter des pantalons rouges comme Bowie, ça marque quand même son homme. Que reste-t-il de tout cela au final? Comment enfin prendre la parole avec sa fille? Peut-on pardonner après si longtemps? Je reçois Sophie Bienvenu, ce soir à Mission encre noire.
60 min
Mission encre noire 09 novembre
Émission du 8 novembre 2022
Mission encre noire Tome 36, Chapitre 394. Niagara par Catherine Mavrikakis paru en 2022 aux éditions Héliotrope. Ici nous sommes en présence de la voix de la narratrice au pied des célèbres chutes, l'eau et ses remous se déchaînent. Elle guette encore au bord du parapet l’apparition improbable de la silhouette fantomatique de sa mère, morte depuis belle lurette, dérivant au long des rives des grands fleuves du continent américain. Car voilà, ce deuil, éveille en elle, un rêve insensé, que ce soit à partir des photos de son enfance, lors d’une première visite à Niagara en 1964, ou bien à la suite d'une citation de marguerite Duras, la narratrice voit encore et encore, le corps aimant disparaître sous les écumes et rejoindre les berges du Mississippi. Marquée par le séisme provoqué par cette perte, elle y puise une inspiration inédite, qui, sur le modèle de François-René de Châteaubriant, ou est-ce peut-être Flaubert, Mallarmé ou même Jeff Buckley et bien d’autres, lui permet d’élaborer de véritables Mémoires d’outre-tombe. Se dessine, alors, sous la plume espiègle et badine de l’autrice, un portrait tout aussi jouissif que douloureux, de ce qui fonde, il faut bien se l’avouer, un héritage littéraire. Plouf, donc, sillonnant le territoire nord américain des songes, Catherine Mavrikakis s’amuse à dégringoler ces chutes, car c’est à Niagara qu’elle contracté la maladie de la mort. De quoi s’agit-il au juste? J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Catherine Mavrikakis.
60 min
Mission encre noire 18 octobre
Émission du 18 octobre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 393. Candy par Benjamin Gagnon Chainey paru en 2022 aux éditions Héliotrope. Lorsque la nuit se drape de faux-semblants, Candy, drag queen, multiplie les numéros au cabaret Rocambole à Villecresnes. Dans sa loge, elle se prépare à la gloire, à danser et à chanter en pleine lumière. Thierry meurt un peu plus chaque nuit pour laisser éclore la glamoureuse étoile qui naît sous les yeux ébahis de la foule en délire. Et si le cabaret commence à bander, c’est pour son Mathurin qu’elle tremble. C’est pour lui qu’elle chante, c’est pour lui qu’elle va fuir ces bas-fonds. Mathurin et sa femme fatale vont se déguiser en courant d’air et mettre le cap sur le paradis en talons haut. Une ombre distordue les attend, cependant, au détour d’une rue. Une hideuse vieillarde, porteuse de malheur, qui ricane et toussote. Ils commettront leur premier meurtre. Déclarés coupables, les amants briseront pourtant leur chaîne et ils s’uniront pour le pire car l’enfer est pavé de bonnes intentions. Conte d’amour pour adultes et vacciné.e.s, cette cavale du tonnerre déroule son tapis rouge avec style et emphase, dans les plis duquel, il se pourrait, que l’éternelle Divine de Jean Genet se prenne les pieds. Candy, la vie contée d’une Notre-Dame-des-Fleurs enceinte d’un fruit d’amour impossible, devient un fascinant lieu de passages entre les identités, la réalité et la fantasmagorie. En route, donc, pour l’Eden. Faites gicler strass et paillettes, j’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Benjamin Gagnon Chainey.
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