Nouveau v379
Mission encre noire

Émission du 20 octobre 2020

 Mission encre noire Tome 29 Chapitre 338. 2030 de Philippe Djian paru en 2020 aux éditions Flammarion. Le beau-père de Lucie est furieux contre les tags injurieux sous les fenêtres des laboratoires SveOda. Lucie s'en fout, elle ne connaît pas la demi-mesure. Surtout depuis sa rencontre avec cette jeune femme de 30 ans, qui, sans ses nattes, ressemble plus aujourd'hui à Naomi Klein. D'autant que celui-ci, aidé par son beau-frère, permet encore la circulation du Montrazol, un poison que certains vaporisent dans les champs. Puis arrive le moment où Anton et Greg surent avec certitudes que la zone de turbulences, provoquée par une enquête administrative, serait ici pour durer. Et il ne fait aucun doute que l'un et l'autre auront beaucoup à perdre. Il fait chaud, vous allez cuire même, en cette année 2030. Vous avez l'air surpris et pourtant Greta Thunberg, ici vieillie de quelques années de plus, vous avait prévenu. Philippe Djian nous plonge au milieu d'un drame familial autour de six personnages. Un résumé d'une humanité en déroute, où même l'amour est une maison qui brûle et où la jeunesse fonce tout droit vers un drôle de vol plané. Qu'on se le dise: le business comme le sexe continuent de faire tourner le monde. L'auteur fait tinter une sonnette d'alarme pour celles et ceux qui en douteraient encore: le futur c'est déjà aujourd'hui, en pire. Philippe Djian sème parfaitement le trouble, il est notre invité, ce soir, à Mission encre noire. Extrait: « Lucie était assise au milieu du tapis, devant la baie ouverte. La nuit tombait, il faisait lourd, oh pour ça il ne faisait pas froid, mais elle se demandait depuis combien de temps elle n'avait pas vu le soleil, un rayon danser dans le salon, une lumière directe traversant le ciel bleu. Il s'était planté devant Lucie tandis qu'elle examinait la question. respire un d'air et dis-moi ce que tu sens, déclare-t-il. Concentre-toi. Ferme les yeux. Je l'ai senti tout de suite en arrivant, j'ai même tendu la main avant de descendre. Tu veux parier avec moi, lança Aude en pivotant sur son fauteuil. Il ne va pas tomber une seule goutte dans les jours qui viennent. Tu paries. je ne vais parier de l'argent avec toi. C'est celui que je te donne. La partie manque déjà de piment, pour moi, avant même de commencer. Tu paries, oui ou non. Pas une goutte avant trois jours. Rien avant samedi soir, minuit. Lucie nous servira de juge. Très bien. On est d'accord. En tout cas, je ne sens rien du tout, annonça Lucie.» Avec un poignard de Mathieu Leroux paru en 2020 aux éditions Héliotrope. «Welcome to fabulous Las Vegas Nevada». L'enseigne du Las Vegas Blvd est sans ambiguïté, le narrateur attend que l'image s'inscrive dans le cadre blanc du Polaroid, pour prendre conscience du glam qui l'entoure. Même si Jax, son amant actuel à Montréal, caresse encore l'idée de retrouvailles ici dans le désert, ce n'est pas son cas. Pas encore. Depuis qu'il a officialisé son projet et sa date de départ, il ne rêve que d'une chose: défier cette ville, qu'il déteste à priori. Il y a perdu son ex, et il fallait bien ça, comme distance, pour échapper aussi à la voix chétive de son père atteint d'Alzheimer. Puisque les soirées endiablées s'accélèrent, autant immerger la bête qui sommeille en lui jusqu'à la moelle. Mathieu Leroux se charge de la course. La visite alternative de la ville sera aussi, sous une apparence déboutonnée, folle et éreintante, l'occasion d'une sévère remise en question. S'il échoue dans la quête de son père, épuisé, groggy sous l'égide combinée de deux archanges improbables que sont David Bowie et Franz kafka, c'est bien à Berlin qu'il se réveille. Avec un poignard est un splendide roman qui s'offre à nous comme une proposition de trip, où il est question de liberté chèrement acquise. je reçois, Mathieu Leroux à Mission encre noire. Extrait: « La ville semble aux prises avec un étrange mal-être, une crise d'identité perpétuelle. Trop aseptisée pour être encore interdite, trop adulte pour qu'un enfant s'y retrouve. Over-the-top, sans réussir à être complètement flamboyante. Une showgirl de papier mâché. Avec les hommes de mon téléphone, j'entretiens quelques conversations qui, faute d'être pleinement enrichissantes, ont l'avantage d'être sans complications. Pas de service après-vente, personne à blesser. Quelquefois, les échanges deviennent assez intéressants pour se rendre à une baise. Jamais une deuxième. Je bargain. Je deale le sexe comme Sab troque ses produits MAC. J'utilise les gens pour découvrir la ville et en retirer ses richesses - comme n'importe quel autre voyageur utilise son argent pour jouir d'une ville avant de la quitter.»

Feuille de route

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Mission encre noire 07 décembre
Émission du 6 décembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 397. Un homme et ses chiens par Marc Séguin paru en 2022 aux éditions Leméac. Que faut-il donc pour qu'un homme se dise presque heureux ? Dans sa vie, il a eu ses chiens, Mujo son premier, il avait sept ans, son confident. Easter, Goose et Maya suivront. Dès ses 4 ans, il a souhaité la fin du monde. Ne sachant trop quoi faire de cette euphorie soudaine, il détruit ses modèles complexes pour pouvoir les reconstruire. Plus tard, il fuira le monde et ses conventions à travers les drogues, puis les livres. Il aura connu l’amour, à plusieurs reprises, malgré sa sauvagerie. Sans cynisme, il constatera son incapacité à partager son quotidien bien longtemps. Ce qu'il cherche est plus grand que soi, une façon de vivre qui pourrait taire sa colère intérieure. Il restera à Anticosti plusieurs années, puis sur l’île aux Naufrages. Il deviendra guide de chasse, avec ses chiens, pour accompagner de riches américains, des français ou des anglais. Néanmoins, la question demeure: que faire de ses forces obscures qui le bousculent ? Comment apaiser ses rapports amoureux ? Marc Séguin nous présente le portrait tout en nuances d’un homme qui s’inscrit en rupture de la société. Lui qui aimerait tant ajouter un chapitre de bonheur véritable à l’histoire de sa vie, même s’il juge le quotidien définitivement trop triste. Pourtant si l’humanité court à sa perte, à quoi cela sert-il de vouloir encore aimer, pour de vrai, en grand, jusqu’à la douleur peut-être? Si par un ciel clair, il est encore possible de voir des étoiles filantes aujourd’hui, parfois elle nous attire comme un mauvais rêve, loin du vide. Pour nous signifier que nous ne sommes pas seul au monde. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire Marc Séguin.
60 min
Mission encre noire 30 novembre
Émission du 29 novembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 396. Les allongées par Jennifer Bélanger et Martine Delvaux paru en 2022 aux éditions Héliotrope. Les deux autrices confessent être prise en otage par des douleurs et des fatigues chroniques, si brutales parfois, à vous laisser le souffle court. Comment témoigner de ce qui échappe au regard, de ce qui ne se partage pas,voire jamais ? À quoi ressemble le monde vu d’un lit, cet étrange objet, lieu grave s’il en est, lieu de naissance, de passion, de désir, de mort, de souffrance et aussi d’oubli. Car voilà, comment peux-t-on avoir une vie quand on la subit couchée? Martine Delvaux et Jennifer Bélanger s’entourent d’autres femmes, écrivaines, artistes, amies, mères, filles, amantes et soignantes pour rendre hommage à toutes celles qui plient sans doute un peu plus chaque jour sous le poids de leur plaies et blessures ; les accidentées, les insomniaques, les survivantes et qu’on invisibilise encore trop souvent. Les voix de ces femmes qui luttent, se rebellent, s’arc-boutent devant un monde qui préfère les reléguer aux rôles de paresseuses, d’hystériques ou de martyres cinglent les pages de ce court essai. Même si leurs corps les obligent à ralentir, les deux autrices ne renoncent surtout pas à redonner une voix à celles laissées pour mortes. Pour toute une famille élargie de résistantes, il reste le rêve et l’écriture d’autres récits, j’accueille, à Mission encre noire, Jennifer Bélanger et Martine Delvaux.
60 min
Mission encre noire 23 novembre
Émission du 22 novembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 395. J’étais un héros de Sophie Bienvenu paru en 2022 aux éditions Le Cheval d’août. Yvan, 62 ans et Miche, sa colocataire-sa blonde, se retrouvent démuni.e.s aux urgences d’un hôpital pour recevoir un diagnostic sans appel. Yvan a passé sa vie à se détruire, Miche aussi d’ailleurs, étant devenue alcoolique comme lui. Il est tout seul, il l’a toujours été, sa vie aura été ça : un amas d’affaire ratées et d’occasions perdues. Ça fait 20 ans qu’il n’a pas revue Gabrielle, sa fille. Il ne lui a même jamais donner son numéro de téléphone.Que pourraient-ils se dire de toute manière? Pourtant dans le temps, il était son héros. C'est lui qui le dit. Son rire d'enfant faisait de lui un surhomme. Heureusement, aujourd'hui il lui reste encore un chat trouvé dans les poubelles et Miche qui l'ennuie. Il fait ce qui lui tente l'animal, il est libre, il est maître de son destin. Ça lui plaît ça, à Yvan. Rien n'est moins vrai. Sophie Bienvenu nous dévoile le portrait d’un homme blanc, d’un baby boomer, prisonnier des rôles qu’il s’est imposé. Il vient d'une génération qui se sait malhabile avec les émotions et qui préfère encore les silences ou les baisers de feu de l’ivresse pour colmater les cicatrices du passé. Enfant quand on a le goût de pleurer devant Lassie, de jouer avec les petites filles à la poupée, et, plus tard, de vouloir porter des pantalons rouges comme Bowie, ça marque quand même son homme. Que reste-t-il de tout cela au final? Comment enfin prendre la parole avec sa fille? Peut-on pardonner après si longtemps? Je reçois Sophie Bienvenu, ce soir à Mission encre noire.
60 min
Mission encre noire 09 novembre
Émission du 8 novembre 2022
Mission encre noire Tome 36, Chapitre 394. Niagara par Catherine Mavrikakis paru en 2022 aux éditions Héliotrope. Ici nous sommes en présence de la voix de la narratrice au pied des célèbres chutes, l'eau et ses remous se déchaînent. Elle guette encore au bord du parapet l’apparition improbable de la silhouette fantomatique de sa mère, morte depuis belle lurette, dérivant au long des rives des grands fleuves du continent américain. Car voilà, ce deuil, éveille en elle, un rêve insensé, que ce soit à partir des photos de son enfance, lors d’une première visite à Niagara en 1964, ou bien à la suite d'une citation de marguerite Duras, la narratrice voit encore et encore, le corps aimant disparaître sous les écumes et rejoindre les berges du Mississippi. Marquée par le séisme provoqué par cette perte, elle y puise une inspiration inédite, qui, sur le modèle de François-René de Châteaubriant, ou est-ce peut-être Flaubert, Mallarmé ou même Jeff Buckley et bien d’autres, lui permet d’élaborer de véritables Mémoires d’outre-tombe. Se dessine, alors, sous la plume espiègle et badine de l’autrice, un portrait tout aussi jouissif que douloureux, de ce qui fonde, il faut bien se l’avouer, un héritage littéraire. Plouf, donc, sillonnant le territoire nord américain des songes, Catherine Mavrikakis s’amuse à dégringoler ces chutes, car c’est à Niagara qu’elle contracté la maladie de la mort. De quoi s’agit-il au juste? J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Catherine Mavrikakis.
60 min
Mission encre noire 18 octobre
Émission du 18 octobre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 393. Candy par Benjamin Gagnon Chainey paru en 2022 aux éditions Héliotrope. Lorsque la nuit se drape de faux-semblants, Candy, drag queen, multiplie les numéros au cabaret Rocambole à Villecresnes. Dans sa loge, elle se prépare à la gloire, à danser et à chanter en pleine lumière. Thierry meurt un peu plus chaque nuit pour laisser éclore la glamoureuse étoile qui naît sous les yeux ébahis de la foule en délire. Et si le cabaret commence à bander, c’est pour son Mathurin qu’elle tremble. C’est pour lui qu’elle chante, c’est pour lui qu’elle va fuir ces bas-fonds. Mathurin et sa femme fatale vont se déguiser en courant d’air et mettre le cap sur le paradis en talons haut. Une ombre distordue les attend, cependant, au détour d’une rue. Une hideuse vieillarde, porteuse de malheur, qui ricane et toussote. Ils commettront leur premier meurtre. Déclarés coupables, les amants briseront pourtant leur chaîne et ils s’uniront pour le pire car l’enfer est pavé de bonnes intentions. Conte d’amour pour adultes et vacciné.e.s, cette cavale du tonnerre déroule son tapis rouge avec style et emphase, dans les plis duquel, il se pourrait, que l’éternelle Divine de Jean Genet se prenne les pieds. Candy, la vie contée d’une Notre-Dame-des-Fleurs enceinte d’un fruit d’amour impossible, devient un fascinant lieu de passages entre les identités, la réalité et la fantasmagorie. En route, donc, pour l’Eden. Faites gicler strass et paillettes, j’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Benjamin Gagnon Chainey.
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