Nouveau v379
Mission encre noire

Émission du 28 septembre 2021

 Mission encre noire tome 32 Chapitre 364. Pompières et pyromanes de Martine Delvaux paru en 2021 aux éditions Héliotrope dans la série K. L'odeur préféré de Martine Delvaux est un parfum de feu. Le monde brûle la chandelle par les deux bouts, les mauvaises nouvelles s’accumulent de jour en jour concernant l’état de notre planète. Face à la crise climatique Martine Delvaux refuse de baisser les bras. Elle décident de s’unir au combat que mène la génération de sa fille. Celui de ces femmes, libre-penseuses, solidaires et volontaires, militantes ou sacrifiées sur l’autel de l’Histoire qui choisissent de résister aux empêcheurs de tourner en rond, aux langues de bois, aux mot usées, aux mensonges et aux abus de toutes sortes. Ce livre est né de la fascination de l’autrice pour le feu, pour toutes celles qui ont joué avec le feu et qui continuent à le faire. Ce livre-collage est le point de départ d’un incendie qui roule au fil des pages, et n’attend plus que vous lectrices et lecteurs, pour prendre de l’ampleur. Je vous propose de partager le feu sacré de Martine Delvaux ce soir à Mission encre noire. Extrait:« Octobre 2019. En Californie, pendant l’incendie de Simi Valley, une jument, au moment où on la guidait vers une remorque pour l’éloigner du feu, s’est dégagée des palefreniers pour faire demi-tour et foncer vers le bas des collines enflammées. Une vidéo la montre en train de courir vers un poulain et un autre grand cheval, désorientés, perdus dans le chaos. La jument, du nom de Prieta, était la grand-mère du poulain âgé de deux mois et qui répondait au nom d’Onyx, le petit de sa fille, la jument Mona Lisa. Les chevaux et les juments, explique une palefrenière, partagent avec les humain·es cet élan instinctif qui les pousse à vouloir sauver les membres de leur famille / Article trouvé en ligne : Ce que toute mère devrait savoir en cas d’incendie. Ma peur est plus grande que la raison. J’ai une idée vague de l’emplacement des sorties d’urgence de notre immeuble. Je n’ai jamais imaginé de plan d’évacuation. Je n’ai jamais fixé de point de rencontre à l’extérieur en cas de séparation. Je ne t’ai jamais dit de ne pas te cacher dans un placard ou sous un lit. Est-ce que tu sais qu’il faut rester collée au sol en cas de fumée ? Est-ce que tu sais comment faire si tes vêtements prennent feu, comment il faut se jeter par terre et se faire rouler pour étouffer les flammes ? » Lien pour participer aux 15 ans d'Héliotrope: https://www.facebook.com/editionsheliotrope/photos/a.184973892157/10159413076392158/ https://www.editionsheliotrope.com/ Y avait-il des limites si oui je les ai franchies mais c’était par amour ok de Michelle Lapierre-Dallaire paru en 2021 aux éditions La mèche. À l’annonce du suicide de sa mère, la narratrice snappe. Elle a 27 ans. La veille des funérailles, alors qu’elle dort dans son ancienne chambre, elle entend sa voix à elle qui se confond avec celle de sa mère. La douleur est telle, insidieusement, elle glisse vers un point de non retour. Le corps se déconnecte de la conscience. Les émotions qui la submergent peuvent l’avaler, à tout moment, toute entière, dans un dernier trip, à tout détruire sur son passage. Elle, inclue. Michelle Lapierre-Dallaire écrit comme on brûle un certificat de naissance pour décrire sur la maladie mentale. Un témoignage livré à fleur de peau, le corps transpercé par les agressions multiples qu’on lui fait subir. Comme le déclare l’autrice, il fallait sacrifier quelqu’un pour écrire ces histoires, pour les faire lire à des gens qui ne souhaitent jamais les vivre. On comprend assez vite que le cadre du livre ne suffit pas. Il n’empêche que L’autrice maîtrise sa verve comme sa rage de vivre comme jamais, dans ce premier roman. Comment l’autrice a-t-elle relevé ce défi? comment faire rentrer un témoignage aussi puissant sur la maladie mentale, les violences sexuelles et familiales et les relations amoureuses dans le format d’un livre? J’accueille Michelle Lapierre-Dallaire, ce soir, à Mission encre noire. Extrait:« Le monde qui parle trop fort au restaurant me donne envie de prendre la vaisselle, de la faire exploser par terre. de me mettre à raconter en criant et en riant trop fort la fois où je me suis fait pisser dessus par un homme marié dans un motel. Quand les gens font du bruit, je ne tolère pas d'en faire moins qu'eux. je veux que mon bruit à moi soit plus fort que celui des autres, que mon chaos sonore envahisse l'espace tout entier. C'est moi la plus bruyante, c'est moi qui provoque les plus belles cacophonies. Je pleure fort, je ris fort, je parle fort. Je ne suis pas heureuse, j'exulte. Je ne suis pas triste, j'agonise. Tout m'apparaît comme un bon prétexte pour casser le silence ambiant. Je n'aime pas le silence parce que j'ai peur de m'entendre vivre. Quand je surprends un de mes propres battements de coeur, j'angoisse à propos de ce corps amour-haine qui abrite un torrent. Mon corps, c'est mon seul barrage contre moi-même. Même s'il est peu fiable, c'est le seul. C'est pour ça que j'offre toujours à tout le monde de baiser. C'est la seule façon que j'ai trouvé de communiquer sans déchirer l'intérieur de l'autre, sans l'anéantir. Je partage mon barrage pour éviter de décharger mes déferlantes. Mais je ne partage rien à moitié. En fait, je partage tellement que je donne tout ; il ne reste jamais rien pour moi. Je prends mes petits restes et je me refais un corps constellé de fissures, de trous noirs. Chaque fois, c'est un peu plus risqué. Mais, comme disait ma mère, quand tu penses que t'es pu capable, t'es capable encore.» https://www.groupecourteechelle.com/la-meche/    

Feuille de route

Tous les épisodes

Mission encre noire 25 avril
Émission du 25 avril 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 407. Loger à la même adresse, conjuguer nos forces face à la crise du logement, l’isolement et la pauvreté par Gabrielle Anctil paru en 2023 aux éditions XYZ dans la collection Réparation. Plus de 80% de la population canadienne vit en ville selon statistique Canada en 2018, de 2001 à 2021. Le nombre de ménage composé de colocataires a augmenté de 54%, et en 2018 toujours, la Journée des communautés intentionnelles a accueilli près de 200 participant.es à Montréal. Si cette tendance coïncide avec le besoin de se loger pour moins cher devant l’augmentation abusive des loyers dans la métropole, elle révèle aussi le désir de s'offrir une autre manière de vivre. Au Québec, les nombreuses Premières Nations au pays ont vécu en communauté depuis la nuit des temps, la province possède également une longue histoire de collaboration à travers le tissu riche et variés de ses coopératives. Gabrielle Anctil vit depuis 14 ans dans une communauté intentionnelle nommé La cafétéria. Nourriture partagée, dépenses amorties en groupe, des corvées aux six semaines, des préparations de soupers collectifs deux fois par semaine font partie de sa routine de vie en communauté intentionnelle dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve à Montréal. Ce premier essai, affublé d’une clinquante couverture orangée, se veut autant un témoignage de première main qu’une boite à outil pour celles et ceux qui rêvent de vivre autrement, et qui désirent de changer radicalement de mode de vie. Comme le dit si bien l’écrivain de science fiction Alain Damasio, au lieu de rêver du grand soir, mieux vaut savoir bifurquer. Une attitude qui ouvre vers d’autres possibles collectifs, car une communauté intentionnelle s’est également envisager une autre façon de vivre socialement et politiquement ensemble. Je reçois, ce soir, à Mission encre noire, Gabrielle Anctil.
60 min
Mission encre noire 28 mars
Émission du 28 mars 2023
Mission encre noire Tome 37 chapitre 406. Jour encore, nuit à nouveau par Tristan Saule paru en 2023 aux éditions Le Quartanier dans la collection Parallèle Noir. Loïc ne sort plus de chez lui. Il scrute la place carrée par la lunette de sa carabine tchèque de calibre. 22. L'oeil collé au viseur, il observe la France déconfinée en mai 2020. Cela fait un an que Loïc n’a pas mis un pied dehors. Il voit bien la grande esplanade depuis son troisième étage du bâtiment B. Il n’en peut plus de se savoir menacé par le virus, les vaccins, les femmes, l’usine de métallurgie qui l’emploie. Heureusement il y a encore Nini, sa sœur qui est DRH chez Lapeyre, le spécialiste en menuiserie, elle lui fait ses courses. Sans oublier, Elora Silva, un des rares lien avec l’extérieur qui lui reste. Avec peut-être aussi quelques séances avec l’atelier de théâtre du quartier auquel il s’est inscrit. Il y retrouve Zineb et son délicat visage cerné par son hijab qu'il aime tant. Il va peu à peu perdre pied, être licencier, se couper de ses proches, entendre des voix, celles des personnages beckettiens de la pièce de théâtre qu’il écrit pour l’atelier, Clic et Cloque. Alors, il promène sa lunette de fusil vers la place, elle pointe vers son avenir, il a les larmes aux yeux. Roman sur la solitude, l’isolement, la difficulté de vivre le confinement, ce nouveau chapitre des Chroniques de la place carrée évoque le moisissement intérieur d’un homme et d’un monde ébranlé par la pandémie. Ce regard paranoïaque et menaçant qui balaie la place carrée se révèle un portrait frontal d’une France malade, qui a perdu ses repères. Nous embarquons ce soir pour ce thriller psychologique hypnotique en compagnie de Tristan Saule qui est notre invité à Mission encre noire.
60 min
Mission encre noire 14 mars
Émission du 14 mars 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 405. Cet exécrable corps, dissection de la grossophobie internalisée par Eli San paru en 2023 aux éditions Remue-ménage avec des illustrations de l’autrice. Si «ce corps me pousse à hurler», ce sont les premiers mots du texte, il permet aussi d’écrire sur la grossophobie ambiante. Il faut du cran lorsqu’on a mal à la peau, lorsque votre propre organisme vous dégoûte, lorsque votre morphologie devient une véritable prison, pour prendre la plume pour creuser plus profond. Tout en étant admiratrice de leur audace, et de la détermination du collectif, l’autrice avoue avoir de la difficulté à adhérer complètement au mouvement body positive, bien malgré elle. Aucune animosité à cela, de sa part, Eli San partage le même constat, les grosses personnes font l’objet d’une stigmatisation sociale omniprésente. La militante féministe et bibliothécaire montréalaise se met à nu, dans son intimité, dans son quotidien. Si personne n'ose vraiment le faire, l'autrice se réapproprie un champ d’expression de soi, au risque de déplaire. Parler de ses inconforts, des difficultés rencontrées dans sa vie amoureuses, de s’habiller à son goût, de monter des escaliers, bref, que ce soit dans la désinvolture ou l'aveu de faiblesse, Eli San est loin de vouloir se décourager, ni loin de vouloir blesser qui que ce soit. Ses confidences font mouche. Justement, parce que l’autrice s’y révèle vulnérable.Et dans ce miroir d’elle-même qu’elle nous tend, de toute cette haine de soi qui refait surface assurément, elle déclare la guerre aux préjugés: c’est le travail d’une vie. Pour en finir de vivre dans l’invisibilité j’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Eli San.
60 min
Mission encre noire 01 mars
Émission du 28 février 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 403. Cher Connard par Virginie Despentes paru en 2022 aux éditions Grasset. Oscar Jayack, un modeste romancier, ne pensait pas vraiment être lu par Rebecca Latté, une star de cinéma en fin de carrière, lorsqu’il publie un texte abjecte, sur Instagram. Et pourtant, sa réponse sous la forme d’une correspondance sera cinglante : Cher connard. Effacer sa publication n'y suffira pas, il lui admet son erreur. Elle n’a que faire de ses excuses mielleuses. Élevé dans les mêmes quartiers, être le frère de la meilleure amie de Rebecca dans les années 80, Corinne, n'y changera rien. Il a eu tort. Néanmoins, le dialogue va peu à peu s’instaurer. Ils ont en commun d’avoir grandi dans des banlieues ouvrières dont tout le monde se fout. Dans ce roman épistolaire, se dessine en creux un portrait accrocheur de deux solitudes, celui d’une génération engluée dans l’héritage patriarcal des années post-soixante-huitardes. Chacun.e englué.e dans diverses dépendances à l'alcool et aux drogues, se prennent le mouvement MeToo de plein fouet. «La vengeance des pétasses» comme le dit Oscar, contre le fameux mâle blanc. Alors que Zoé Katana, une ancienne attachée de presse d’édition le dénonce à son tour dans son blogue féministe radical, Oscar montre un autre visage. Et puis il y aura la COVID. Le confinement fait déambuler Rebecca et Virginie Despentes dans les rues vides d’un Paris qui a disparu. Cette ville, qu’elles connaissent si bien, n’est plus. Virginie Despentes se livre plus que jamais ici sur ses amours et ses intoxications aux drogues. Il est toujours grisant de retrouver ce ton si particulier, un mélange d'esprit contestataire et de regard critique sur notre époque porté par une voix badass. À celles et ceux qui la trouve radicale, elle rétorque : «la féminité est une prison et on en prend pour perpet.» Si Cher connard peu paraître un roman de la réconciliation, ne soyez pas dupes. Ce livre est une maison, celle de toutes les féministes, une décharge avec des rats et d’autres mauvaises filles. Punk as always, Cher Connard par Virginie Despentes paru en 2022 aux éditions Grasset.
60 min
Mission encre noire 15 février
Émission du 14 février 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 403. Mon fils ne revint que sept jours par David Clerson paru en 2023 aux éditions Héliotrope. Fin juin, ce matin là, une mère retrouve son fils qu’elle n’a pas vu depuis dix ans, au chalet familial en Mauricie, situé en pleine forêt. Elle y vit seule depuis sa retraite, ne recevant que de rares visites. Une fois passée la surprise, elle reconnaît son Mathias, devant sa porte, même s’il est devenu un homme plus grand que dans ses souvenirs. Tandis qu’ils marchent vers une tourbière, un lieu de refuge depuis l’enfance, Il va lui raconter sa vie d’errance. Une obsession l'accable sans cesse. L’idée persistante qu’une matière blanchâtre lui occupe le crâne et coule dans son corps, comme si elle voulait l’étouffer. Incapable de trouver sa place dans un monde qui s'agglomère en une gigantesque banlieue, il ne pense encore qu'à fuir. Pour sa mère, les journées sont belles en sa présence, malgré ce regard envoûtant de tourbière, qui parfois l'effraie. Comme la plupart de ses romans précédent, on retrouve chez l’auteur cette part d’étrangeté, de répétitions, de cycles où se combine un étrange cocktail de monstruosité, d’hallucination, d’égarement et de névrose qui plonge inlassablement le lectorat dans le doute et la curiosité. Je vous invite, ce soir, à glisser entre les branches, dans le chant assourdissant des rainettes et celui plus lourd des ouaouarons, je reçois David Clerson, à Mission encre noire.
60 min