Nouveau v379
Mission encre noire

Émission du 25 avril 2023

Mission encre noire Tome 37 Chapitre 407. Loger à la même adresse, conjuguer nos forces face à la crise du logement, l’isolement et la pauvreté par Gabrielle Anctil paru en 2023 aux éditions XYZ dans la collection Réparation. Plus de 80% de la population canadienne vit en ville selon statistique Canada en 2018, de 2001 à 2021. Le nombre de ménage composé de colocataires a augmenté de 54%, et en 2018 toujours, la Journée des communautés intentionnelles a accueilli près de 200 participant.es à Montréal. Si cette tendance coïncide avec le besoin de se loger pour moins cher devant l’augmentation abusive des loyers dans la métropole, elle révèle aussi le désir de s'offrir une autre manière de vivre. Au Québec, les nombreuses Premières Nations au pays ont vécu en communauté depuis la nuit des temps, la province possède également une longue histoire de collaboration à travers le tissu riche et variés de ses coopératives. Gabrielle Anctil vit depuis 14 ans dans une communauté intentionnelle nommé La cafétéria. Nourriture partagée, dépenses amorties en groupe, des corvées aux six semaines, des préparations de soupers collectifs deux fois par semaine font partie de sa routine de vie en communauté intentionnelle dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve à Montréal. Ce premier essai, affublé d’une clinquante couverture orangée, se veut autant un témoignage de première main qu’une boite à outil pour celles et ceux qui rêvent de vivre autrement, et qui désirent de changer radicalement de mode de vie. Comme le dit si bien l’écrivain de science fiction Alain Damasio, au lieu de rêver du grand soir, mieux vaut savoir bifurquer. Une attitude qui ouvre vers d’autres possibles collectifs, car une communauté intentionnelle s’est également envisager une autre façon de vivre socialement et politiquement ensemble. Je reçois, ce soir, à Mission encre noire, Gabrielle Anctil.

ExtraitVue de l'extérieur, une communauté intentionnelle est un lieu de vie plutôt classique. En regardant à travers nos fenêtres, vous pourriez voir que nous menons des activités peu différentes de celles qui ponctuent le quotidien de nos voisin.e.s : on fait à souper, on écoute la télé, on passe le balai, on prend un verre après le travail...Vue de l'extérieur, notre vie est généralement plutôt banale. Ne soyez pas berné.es. Les communautés intentionnelles sont un lieu d'effervescence. Le simple fait de vivre ensemble selon un modèle hors norme nous amène à poser des gestes qui ont un impact majeur sur nos habitudes de vie. En vivant ainsi, nous offrons des solutions concrètes à des défis auxquels nous devons tous et toutes faire face quotidiennement: les effets du vieillissement de la population, le travail d'élever des enfants, les maladies soudaines et les épidémies, la disparition du couple nucléaire et bien d'autres. Nous réinventons la manière de tenir notre logis en ordre et de préparer à souper et, avec ça, nous trouvons des solutions à la crise climatique et aux inégalités systémiques. Vous ne me croyez pas ? Attachez votre ceinture.»

Motifs raisonnables, dix ans d’affiches politiques par Clément de Gaulejac paru en 2023 aux éditions Écosociété. Parmi les effluves de gaz lacrymo, de claquements incessant de casseroles, de bouts de feutrine de carré rouge ou vert, de débats sans fin dominicaux à la table familiale, que nous reste-t-il de la grève étudiante contre la hausse des frais de scolarité aujourd’hui? En 2012, Clément de Gaulejac dessinait des affiches qu’il publiait en ligne et qui circulait dans la rue. Vous en avez peut-être vu, et le trait de l’auteur vous est, malgré vous, familier. Chapleau, Côté ou bien Pascal Élie sont bien connus parmi les journalistes de presse écrite, le territoire de jeu de l'artiste commence, lui, par la rue. Il prend goût au dessin satirique, à travers un cheminement qui le conduit autour des années 2000, alors qu’il monte sa microstructure d’autoédition, L’eau tiède, vers un blogue en 2006, puis la diffusion d’affiches dans la rue en 2012. En 2021, un site est créé dédié à l’archivage de cet affichage politique, eau-tiède.org. Motifs raisonnables est également le titre d’une exposition qui a eu lieu en 2013 au centre Skol. Accompagné à la mise en page de son complice Vincent Giard, auteur et éditeur de bandes dessinées, ainsi que de Valérie Lefebvre-Faucher en postface, ce livre vous permet de retrouver bon nombre des 300 affiches réalisées par l’auteur depuis dix ans. Entre impostures, blagues potaches, cynisme, satires, Motifs raisonnables jette un regard acéré sur la société en laissant une large place aux illustrations, et aux propos engagés qui s’apparentent plus à la libre parole d’un écrivain public plutôt que ceux de la propagande. Je reçois, ce soir, à Mission encre noire, Clément de Gaulejac.

Extrait Lorsque je présente mon travail d'affiches, on me demande parfois si je pense qu'elles sont « utiles » - sous-entendu: si elles font avancer les causes qu'elles défendent. Je pense que c'est une drôle de question. Un peu comme quand on se demande si une manifestation est utile. Utile à quoi ? Dans une manifestation, un ensemble de personnes, un collectif, se donne à lui-même le spectacle de sa propre puissance. Même si une manifestation interpelle le pouvoir, c'est d'abord à elle-même qu'elle s'adresse. Mes dessins fonctionnent un peu de la même manière: ils prêchent aux convaincu.es. Et c'est vrai que je ne cherche pas à conscientiser un public qui ne le serait pas déjà. Je n'espère qu'une chose: que mes affiches fassent du bien celles et ceux qui les regardent ou qui se les approprient en étendard - comme ces deux manifestant.es qui s'étaient emparé.es de mon affiche du dinosaure sur le camion pour la reproduire sur un grand drap blanc ; ou celles et ceux qui grimpent dans les hauteurs pour y accrocher par-dessus des panneaux publicitaires géants des bannières dénonçant l'implication massive de la plus grande banque canadienne dans l'extraction des sables bitumineux ; ou encore celles et ceux qui barbouillent de colle les portes de cette même institution de la finance fossile / finance hostile.»

Feuille de route

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Mission encre noire 04 octobre
Émission du 4 octobre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 391. Glu par Clémence Dumas-Côté paru en 2022 aux éditions Les Herbes Rouges. Glu: nom féminin. Colle forte.Matière végétale visqueuse et collante, comme pour piéger les oiseaux. Personne importune, indiscrète. Il y a un peu de tout ça dans les liens qui relient Théo, Simon et la narratrice. Depuis sa séparation, elle s’occupe de Bébée, 2 ans, une semaine sur deux, qui pleure parfois, trop, pendant des heures. Ça lui arrive de l’oublier, de la laisser jouer avec un tesson de verre, de l’empêcher de sortir de sa chambre aussi. Ou peut-être est-ce le produit de son imagination. En revanche, un soir de mai, un mercredi pour être précis, un voisin, Simon, se laisse tomber du toit. Que s’est-il passé? Entre quelques promenades salutaires dans Parc-Ex, la nuit, et le long du chemin de fer, à côté du Parc Jarry, elle se découvre aimantée par cette histoire. Elle décide alors de retracer le chemin du voisin de son voisin mort, quelque part elle revit. Théo, pourrait lui donner des réponses aux questions qui l’obsèdent. Toutes sauf une: qu’est-ce qui la retient de commettre, elle aussi, l’irréparable? Son quartier, c’est Parc-Extension, depuis huit ans. Elle y vaque entre vêtements indiens à vendre et pâtisseries grecques en essayant de faire correspondre les morceaux brisés de son monde fissuré, en se branchant à cette imperceptible source, à cette Glu, pour refuser l’appel du vide. J’accueille ce soir, à Mission encre noire, Clémence Dumas-Côté.
60 min
Mission encre noire 27 septembre
Émission du 27 septembre 2022
Mission encre noire Tome 32 Chapitre 390. J’habite une île par Rodolphe Lasnes paru en 2022 aux éditions Leméac. Montréal: 50 km de long, 16 km de large, 483 km carrés de superficie, 266 km de berges, deux millions d’habitants. Êtes-vous des îlien.n.e.s ? Quand avez-vous vu pour la dernière fois le bord de l’eau du fleuve Saint-Laurent? Avez-vous pris le temps de cheminer lentement sur ses berges, de humer ses parfums, d’essayer d’en saisir son ADN, son âme insulaire? Cette île-ville qui généralement néglige son fleuve et le dérobe à la vue de ses habitants, Rodolphe Lasnes l’a couru. Où est-il ce fleuve ? On ne l'entend pas. Pour en avoir le coeur net, il décide de faire son tour de l’île à Pied, d'une seule traite, sans retour à la maison, en sens inverse des aiguilles d’une montre. Départ du Vieux-Port, pour mieux remonter le temps, des origines vers l’est, puis rejoindre l’aval des rapides de Lachine vers l’ouest. L’homme du fleuve ne lâchera pas son eau des yeux. Rodolphe Lasnes vous propose ni plus ni moins de vous projeter en état de voyage, ici même, près de chez vous. Sac à dos léger, un carnet à portée de main, des bâtons et des chaussures de marche, avec en prime une paire de lunettes glacier qui lui permettent de ne jamais perdre le fil du temps, de l’histoire et des mots. Plus précisément, ceux de Pierre Perrault, des cageux de l’Abord-à-Plouffe ou de Réjean Ducharme qu'il garde avec lui au cours de son périple. Pourquoi faire le tour de l’île à pied me direz-vous? L’auteur vous répondra:« pour aborder les rivages, pour que les paysages se transforment en histoires». Je reçois Rodolphe Lasnes, ce soir, à Mission encre noire.
60 min
Mission encre noire 20 septembre
Émission du 20 septembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 389. Le virus et la proie par Pierre Lefebvre paru en 2022 aux éditions Écosociété. Comment faire, oui comment réussir par se faire entendre alors que tout porte à croire que c’est impossible. Transposé sur scène au Centre du théâtre d'aujourd'hui sur Saint-Denis à Montréal, du 30 novembre au 02 décembre 2022, cette lettre, Pierre Lefebvre l'adresse à un homme qui ne veut pas l'écouter. Ou du moins, par cette missive, l'auteur reconnaît son impuissance. Car, voyez-vous, tout les oppose, l'argent, la réussite, la domination ou le pouvoir ne lui inspire au mieux que de la haine et du dégoût. À l'heure où la campagne électorale bat son plein, ne ressentez-vous pas cette légère démangeaison, l’étrange bourdonnement du vide autour des débats médiatiques ? Y trouvez-vous votre place ? Mettons cartes sur table, ici, un homme n’ayant aucun pouvoir aimerait particulièrement s’adresser à ceux les possèdent tous. Pierre Lefebvre signe ici un texte magistral et indispensable. Si les mots ont encore une force, l'auteur saisie sa chance avec du style et du caractère. Ne vous y trompez-pas. Il serait malhabile de ne voir ici qu’une complainte de plus ; vous manqueriez l’essentiel. Quelque chose comme une déclaration d’amour, à la vie, à son mystère, à sa beauté. Je reçois, ce soir, Pierre Lefebvre à Mission encre noire.
60 min
Mission encre noire 13 septembre
Émission du 13 septembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 388. La cité Oblique de Christian Quesnel et Ariane Gélinas paru en 2022 aux éditions Alto. Mission encre noire est de retour ! Pour ouvrir cette nouvelle saison, rien de moins que Howard Phillips Lovecraft comme invité, dissimulé sous les traits de Christian Quesnel et Ariane Gélinas. Tendez l'oreille, les premiers grattements et les frottements de créatures étranges et primitives débordent déjà du cadre de ce podcast. À la lucarne de cette splendide bande dessinée, La cité Oblique, les deux auteur.e.s nous proposent de franchir les portes de l’univers formidable d’un géant de la littérature fantastique, inspiré.e.s par les voyages de celui-ci. Le créateur du Mythe de Cthulhu a, non seulement rendu visite, par trois reprises, à la ville de Québec, il en a également tiré sa propre version de l’histoire de la Nouvelle-France. Prenant la balle au bond, Christian Quesnel et Ariane Gélinas, s’accaparent cette matière première, les écrits de Lovecraft, pour revisiter et se réapproprier une passionnante histoire parallèle du Québec. À la limite du songe, du fantastique et du rêve, les peuples déchus ou oubliés qui grouillaient sur les terres d’Elkanah, retrouvent une existence dans l’âme craintive des hommes, grâce à ce splendide projet. Les territoires de ceux qui savent, s’ouvrent à celles et ceux qui sauront voir et écouter. À la faveur de la tombée de la nuit, je vous invite à rencontrer Christian Quesnel et Ariane Gélinas, ce soir, à Mission encre noire.
60 min
Mission encre noire 05 juillet
Émission du 5 juillet 2022
Mission encre noire Tome 35 Chapitre 387. Le jeu du rêve et de l’action, étude du roman d’aventures littéraire de l’entre-deux-guerres français par Paul Kawczak paru en 2022 aux éditions Nota bene. Il y a deux ans déjà le roman Ténèbre de Paul Kawczak nous plongeait dans une aventure crépusculaire, envoûtante et gothique. La violence coloniale fait rage au cœur de la forêt impénétrable et menaçante du Congo, un épisode sombre, quasi génocidaire qui a fait 10 millions de mort. Ce roman magistral révèle une affection érudite pour un genre, l’aventure. Le présent essai est la version revue et corrigée d'une thèse de doctorat qui sent le soufre. L'entre-deux-guerre français prends le contre-pied de la production traditionnelle. L'aventure ressurgit chargée de violence et de tension érotique, à cette période, au détour d'un roman français qui l'avait négligé. Robert Louis Stevenson, Joseph Conrad, Blaise Cendrars, Joseph Kessel, André Malraux, Antoine de Saint-Exupéry, André Gide et bien d’autres deviennent, sous la plume savante de l’auteur, les personnages clés d’un temps glorieux où le roman d’aventure littéraire supplante le roman d’aventure traditionnel. Avertissement d’usage: il est bien possible que d’Artagnan succombe aux assaut érotiques de Xi Xiao, maître bourreau chinois, personnage fascinant de Ténèbre, ce soir, à Mission encre noire, alors que je reçois, l’auteur, Paul Kawczak. Extrait:« Ce rapport de l'être de chair à sa propre finitude, rapport exacerbé par le désir d'aller outre sa condition, pose les bases d'un érotisme vers lequel tend toute cette étude. « De l'érotisme, il est possible de dire qu'il est l'approbation de la vie jusque dans la mort», écrit Georges Bataille dans L'érotisme (1957). L'érotisme de Bataille implique une violation généralisée des conditions du vivant et en cela appelle à la violence de la transgression des limites, violence de l'être qui fait violence et se fait violence pour s'éprouver. Violence de l'aventurier. Violence de Don Quichotte, premier aventurier moderne, qui se heurte au monde, à répétition, à la recherche d'une grandeur dont l'absence lentement tue. Le roman moderne, avec Don Quichotte, a établi son acte de naissance en séparant le personnage de ses rêves, en lui rappelant sa condition d'être de chair, en exacerbant son érotisme tout en en condamnant les manifestations, envoyant trois siècles plus tard un Julien Sorel à l'échafaud.» Chroniques de l’abîme et autres récits des profondeurs par Simon Predj, Charles Beauchesne et Pierre Bunk paru en 2022 aux éditions de l’homme. Âmes sensibles s’abstenir. De quoi parlent trois chums enfermés dans un cabane au fin fonds des bois, au plus creux d'un hiver abondant de froid et de neige ?  Ils discutent du royaume des morts bien sûr ! Ou plutôt, ils dégoisent de cet abîme qui leur tend les bras à quelques pas de leur bâtisse. Nietzsche disait: «si tu plonges longtemps ton regard dans l'abîme, l'abîme te regarde en retour.» Puisque les villes fantômes ne cesseront jamais de fasciner, les meurtres sordides non plus, les phares du bout du monde perdus et les voix d’outre-tombe obsédantes peuplent l’ordinaire des récits de ces trois passionnés d’histoires d’horreur, d’épouvantes et autres bizarreries. Cinq récits terrifiants vous attendent patiemment derrière le lustre d’une couverture forcément menaçante signée Pierre Brillault, alias Bunk. Cinq histoires illustrées et accompagnées par les personnages dessinés des auteurs eux mêmes, mis en scène, pour vous mener au bord de l’abîme. Ajouté à cela, des encadrés fort passionnant qui piochent allègrement dans la sagesse populaire, les faits historiques, les phénomènes étranges ou occultes pour étayer la flamme de votre panique. Ce n'est plus le moment de débattre, une porte grince, un murmure se fait entendre, «Nourris-moi...Nourris-moi...». Même s’il n’est pas minuit, je reçois, Charles Beauchesne et Simon Predj à Mission encre noire. Extrait:« Mortifié, Peter ne répond pas. Il reste là à fixer la fissure. Au bout d'un court moment, la lumière s'atténue jusqu'à s'éteindre complètement. Le bourdonnement dans ses oreilles s'arrête et le silence retombe dans la campagne. Était-ce seulement un rêve? Une illusion causée par son épuisement? Si oui, alors pourquoi y a-t-il encore ce grand trou à ses pieds? Peter a du mal à assimiler tout ce dont il vient d'être témoin. Il ferme le cercle de protection rapidement et éteint sa chandelle. Il s'approche du trou et se penche par-dessus pour voir à l'intérieur, mais il fait trop sombre. Il pousse une roche dans la faille avec son pied, et celle-ci disparaît dans les ténèbres. Il attend un bruit lui indiquant que la pierre a atteint le fond, mais cela ne se produit pas. Il rebrousse chemin et retourne dans la maison, auprès du feu. Préoccupé, il a du mal à fermer l'oeil. Il pense à ses parents, à cette phrase semblant être sortie des entrailles de la terre: «Tu as maintenant une dette envers moi.» Peter se réveille en sursaut. Il est passé midi. Il sort dans son champ pieds nus pour aller inspecter la crevasse à la lumière du jour. Il avance la tête au-dessus, en faisant bien attention de ne pas perdre pied. Il n'en voit pas le fond. L'abîme n'est que noirceur. Une odeur nauséabonde de putréfaction s'en échappe. Un frisson lui parcourt le corps. C'est alors qu'il remarque les jeunes pousses qui recouvrent sa terre.»
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