Nouveau v379
Mission encre noire

Émission du 19 janvier 2021

Mission encre noire Tome 30 Chapitre 346. Métamorphoses de Charles-Étienne Ferland paru en 2020 aux éditions L'interligne. La fin du monde c'était il y a un déjà un an. Une simple vibration anodine comme un tremblement de terre a tout changé. Une nouvelle espèce de guêpes géantes est apparue et a ravagé toutes les cultures agricoles de la planète. Les hyménoptères ont faim, l'être humain fera leur affaire. Jack ne veut pas finir prisonnier dans une ruche pour servir de repas. Il dérobe alors un échantillon d'élixir au pouvoir étrange, un moyen inédit de se nourrir. Il fuit alors Montréal à pied pour retrouver sa famille, réfugiée sur l'île de Main Duck Island sur le lac Ontario. Tout devrait bien aller si ce n'est cette soif qui le taraude sans cesse. Et puis il y a la présence de cette silhouette aux yeux jaunes qui le guette et le toise de son sourire mauvais. Il croisera de nombreux réfugié.e.s dans son exil, en particulier une communauté qui vit à l'intérieur d'un dôme grillagé sous la menace d'une bête carnivore impitoyable. Véritable vampire, sa réputation le précède, le monstre sera un obstacle sérieux à la course de Jack. Charles-Étienne Ferland use de toutes les facettes d'un genre qu'il affectionne expressément pour produire une trilogie débuté en 2018 avec Dévorés. Il sait faire partager cet univers si saisissant des littératures de l'imaginaire, en épiçant une trame accrocheuse de multiples trouvailles empruntées à sa connaissance de l'entomologie et de la voile. Imaginez-vous devoir sortir pour vous nourrir seulement le soir et être tenu de surveiller le moindre rayon de lumière synonyme de mort radicale ! J'accueille, ce soir, Charles-Étienne Ferland à Mission encre noire. Extrait:« Les lilas de mai fleurissent. Les moustiques hantent les bois. Camp après camp, refuge après refuge, la bête se jette sur chaque homme, femme, enfant, pour se repaître de leur sang et alimenter un étrange champignon qu'elle transporte dans un sac sur son dos. L'organisme émeraude et cyan possède la forme d'un portobello avec de petites billes sous le chapeau, suspendues depuis les lamelles. C'est dans ces sphères ocre que s'accumule l'hémonectar. La nuit, la bête laisse derrière elle une traînée de spores rouges incandescentes comme un sillage de minuscules étoiles. Derrière la créature chimérique, sèchent des corps vidés. errante et presque nue, elle porte les lambeaux d'une paire de jeans. Sur sa peau épaisse, s'additionnent les cicatrices de multiples coups de feu ou de couteau. Elle flaire les survivants. Alors, ses yeux jaunes se plissent. Dès qu'une odeur de chair fraîche vient chatouiller ses naseaux, le monstre repart pour une nouvelle tournée. Le rituel meurtrier se répète.» Zone 51 de Christiane Lahaie paru en 2020 aux éditions Lévesque éditeur dans la collection Réverbération. Laissez ici vos à priori concernant la zone 51, cette base secrète abritant soi-disant des extraterrestres quelque part dans le désert du Nevada. Cet objet littéraire non identifié que vous tenez dans vos mains n'est pas un roman de science fiction, malgré les apparences. La jeune narratrice fouille ses souvenirs et les notes d'un carnet que tenait à jour Olivia Solès avant son énigmatique disparition, quarante ans plus tôt. Fraichement diplômée, la téméraire équipe embarque à quatre dans un périple à travers la mythique route 66 pour rejoindre la zone 51. Fasciné.e.s  par le phénomène extra-terrestres, sauf la narratrice, issue d'une famille riche et en mal d'émotions fortes, le quatuor va quitter le Québec pour une odyssée de cinq mille kilomètres en passant à travers l'Illinois, le Missouri, le nord du Kansas, l'Oklahoma, le Texas et Le Nouveau-Mexique. Au fil du voyage, les histoires de chacun se révèlent. À la fois récit personnel, road novel et réflexion documentée sur un phénomène qui magnétise l'humanité depuis la nuit des temps, Zone 51 interroge les limites du possible pour une équipée livrée à elle-même, au milieu de nulle part, à la fin des années 80. Christiane Lahaie convainc car elle émeut profondément sur la trajectoire tragique de cette jeune femme perdue. Ce roman vibre de la douce ironie qui s'empare parfois d'un texte critique à l'égard des chimères que s'inventent les êtres humains. Il vous faudra atteindre, à votre tour, les dernières pages pour qu'enfin les secrets émergent. Puisque la vérité est ailleurs, j'accueille Christiane Lahaie à Mission encre noire. Extrait:« Antoine avait tout consulté sur les statues de l'île de Pâques, trop lourdes pour avoir été transportées par des humains, et sur un aéronef qui serait tombé à Roswell. Il se tenait bien au fait des observations d'ovnis de par le monde, toujours suivies d'apparitions d'Hommes en noir. Les hommes en noir, ça, c'était la meilleure. Antoine tenait mordicus à me convaincre. Il prétendait qu'il s'agissait d'extraterrestres espions, chargés de faire taire ceux qui avaient envie de mettre au jour leur présence parmi nous. J'ai eu beau rétorquer que ces fameux inconnus en complets et cravates étaient apparus au début de la guerre froide, il n'a rien voulu entendre. Il avait raconté qu'en 1947, un certain Harold Dahl avait cru voir un ovni au large de Maury Island, s'en était vanté et avait aussitôt reçu une «visite».»  

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Mission encre noire 08 février
Émission du 7 février 2023
Mission encre noire tome 37 Chapitre 402. Cocorico, les gars, faut qu’on se parle par Mickael Bergeron paru en 2023 aux éditions Somme Toute. Il est plus que temps de reconnaître que rien n’est figé dans une société, que les choses bougent, que les comportement évoluent. Qui aurait cru, il y a 20 ans, qu’un mouvement social sans précédent allait naître via, notamment, les réseaux sociaux. En effet, la première campagne hashtag Mee Too en 2017 a changé la donne. De Balance ton porc à #MoiAussi, ces campagnes ont révélé l’ampleur systémique de la violence commises à l’égard des femmes. Dans cet essai édifiant à plus d’un titre, Mickael Bergeron se propose d’abattre l’arbre qui cache a forêt, de débroussailler quelques clichés au passage et de pénétrer dans l’antre de la bête: la masculinité toxique. Il est temps en effet de nous prendre en charge, nous les hommes, de se dire ça suffit; changeons de disque. Osons enfin, nous parler des affaires qui dérangent : l’image de la virilité, la paternité, l’idéal masculin dans le sport ou dans les forces armées, les attentes dans les relations amoureuses ou dans la sexualité, dans les rôles professionnels ou sociaux, les sujets ne manquent pas. Loin d’être donneur de leçon, l’essayiste se met lui-même à nu, en multipliant les anecdotes personnelles et se garde bien de juger. Il est plus que temps de faire notre juste part aux côtés des féministes, qui elles, ne nous ont pas attendu pour s’affirmer. «Vous n’êtes pas tannés, les gars, de tout ce bordel» est-il écrit en préambule ? J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Mickael Bergeron.
60 min
Mission encre noire 01 février
Émission du 31 janvier 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 401. Le monde se repliera sur toi par Jean-Simon Desrochers paru en 2022 aux éditions Boréal. De prime abord, il serait possible de se demander comment lire ce monde pluriel qui se présente à nous. Comment se détacher du fil invisible qui relie les nombreux personnages pris individuellement, qui à force de rencontres, de coïncidences nous amènent à une lecture possible du monde d’aujourd’hui. Alors que Noémie, au sortir d’un mauvais rêve cherche encore ses mots et s’inquiète pour elle et sa fille, au chapitre suivant, celle-ci, à 12 ans, éconduit son premier amoureux, William, qui tente d’incarner un nouvel idéal de masculinité moins toxique. Au prochain chapitre, c'est sa professeure, Madame Claude qui en subira les conséquences. Elle découvre les rumeurs colportées à son sujet alors qu’elle apostrophe un idiot qui lui coupe la voie avec son VUS sur le pont en quittant Montréal, Pierre-Luc prendra toute une section de texte pour se venger...ainsi de suite. La galerie de portrait qui se déploie de Montréal à Tchernobyl, Paris, Philadelphie, Rio de Janeiro, Addis-Abeba, Christchurch et Chittorgarh, nous donne à lire les esquisses familières de trajectoires de vie qui sont autant d’étoiles filantes dans un ciel encombré et menaçant. L’auteur réussit le tour de force d’incarner plusieurs voix, plusieurs émotions, plusieurs destins de papier en mode mineur. Il en résulte un formidable casse-tête, à la mesure des moments de vie dérobés à la lucarne du monde en marche, nous offrant ainsi une profonde réflexion sur ce qui nous construit, sur les lieux qui nous habitent. Si le roman s’ouvre sur une mémoire qui flanche, il n’est pas garantie que le film réalisé avec un cellulaire au final y changera grand-chose. Le monde souffre d'un manque criant d'empathie. Il en meurt sans doute un peu chaque jour, à chaque chapitre ? D’ailleurs s’achève-t-il vraiment ce roman? J’accueille Jean-Simon Desrochers, ce soir, à Mission encre noire.
60 min
Mission encre noire 25 janvier
Émission du 24 janvier 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 400. Je vous présente mes meilleurs vœux pour cette année qui s’annonce. Une année que je vous souhaite riche en découvertes d’auteurices et d’œuvres inspirantes. Mission encre noire repart pour une saison d’hiver, la 400 ème pour être précis. Correlieu de Sébastien La Rocque paru en 2022 aux éditions du Cheval d’août ouvre le bal. Ce roman nous invite à rejoindre, la Vallée-du-Richelieu, près de l’atelier du célèbre peintre du Mont-Saint-Hilaire Ozias Leduc,et plus particulièrement dans celui de Guillaume Borduas, un vieil ébéniste approchant les 70 ans. Formé à la vieille école, il accepte, malgré ses vieux principes, de recevoir en stage, Florence, qui veut reprendre le métier après avoir subi un accident de travail. Recommandé par la CSST, elle doit faire ses preuves, ce retour aux machines est progressif, après avoir été touché par une lame rendu folle dingue à plus de quatre mille tours par minute. Même s’il a toujours travaillé seul, elle le rejoint dans le silence d’un matin blafard au milieu des grésillements d’un vieux poste de radio et l’odeur des planches brutes de pin, de chêne rouge, de peuplier, d’érable ou de merisier. Comme chaque vendredi, elle devra faire la connaissance et refaire le monde avec les vieux mononcles, fidèles en amitié, de Guillaume, et grands consommateurs de caisses de bière. C’est dans le miracle de cet atelier et de ses correspondances sensorielles que Florence s’invite à découvrir un monde éternel, qui se meurt, fait de gestes communs à apprendre, à harmoniser son souffle au rythme d’une respiration à contre-temps d’une époque à bout-de souffle. Avons-nous affaire à de la nostalgie ou à une volonté de vivre autrement, sans faire trop de concession à une modernité dévorante ? Toujours est-il que l’écho de 2012 et du printemps érable s’immisce parfois entre les ramures du Mont-Saint-Hilaire et les odeurs de gasoil de motorisés gigantesques en balades. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Sébastien La Rocque.
60 min
Mission encre noire 21 décembre
Émission du 20 décembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 399. La faute à Pablo Escobar par Jean-Michel Leprince avec une préface de Bernard Derome, paru aux éditions Leméac. Bogotà la mal encarada des villes sud-américaine se trouve en haut d'un plateau andin. Le restaurant de l'hôtel Tequendama, où Jean-Michel Leprince a pris ses habitudes, a volé en éclats, sous une bombe des FARCS. en 2002. Si comme le souligne l’ex-présentateur de nouvelles, chef d’antenne et animateur de télévision Bernard Derome, La Colombie est le deuxième pays le plus riche de la planète en matière de biodiversité, elle est aussi l’un des pays les plus inégalitaire et violent. Tout commence, pour Jean-Michel Leprince, sous les bruits d’hélicoptères, de ceux qui tentent d’arracher des dizaine de personnes à la boue meurtrière qui a englouti la petite ville d’Armero due à l’éruption du volcan andin Nevado del Ruiz le 16 novembre 1985. Armero représente un baptême du feu grave pour le reporter spécialisé en politique étrangère et en défense nationale au Parlement d’Ottawa pour la télévision nationale de la Société Radio-Canada. La Colombie et l’Amérique latine vont devenir pour lui, depuis 37 ans maintenant, le lieu de découvertes et d’aventures inédites. Car voilà, ce pays, non seulement, reste un des rare en Amérique latine à avoir presque toujours connu une gouvernance démocratique, mais il s’est également construit sur la violence, le narcotrafic et la corruption. Un nom revient sur toute les lèvres, bien sûr, Pablo escobar ; une ville aussi, Medellin, qui battait les records du monde de meurtres sous son règne. Les écrits restent, dit-on, voici le livre d’une vie, la somme de plusieurs reportages, d’entrevues de terrain, publiés ici, contextualisés, dans le but de témoigner le plus précisément possible d'un mythe, de l'influence d'un homme sur un pays tout entier voire au-delà. Le journaliste grand-reporter nous offre un récit palpitant qui nous fait fréquenter les bas-fonds du crime organisé à l’échelle continental. J'accueille, ce soir, à Mission encre noire, Jean-Michel Leprince.
60 min
Mission encre noire 14 décembre
Émission du 13 décembre 2022
Mission encre noire Tome 36 Chapitre 398. Von Westmount par Jules Clara paru en 2022 au éditions La mèche. Aline pointe en direction de la fenêtre, elle glisse le doigt vers le Saint-Laurent. Pour le reste, la vue est magnifique, ce versant de la montagne cachera néanmoins, toujours le quartier de sa famille. Elle se souvient, il y a un an déjà, comme chaque matin, sous un ciel gris du mois de décembre par – 24, elle embarquait pour ses quinze minutes d’autobus obligatoire. Elle appréhendait de commencer un nouvel emploi, dans un kiosque du marché de noël du centre-ville de Montréal, pour servir du vin chaud. Il lui fallait être aimable, dire merci/thank you plusieurs fois par jour à des touristes plus ou moins agréables, en espérant un pourboire improbable. Sourire et répondre parfait! à un chef d’équipe autoritaire et escroc étaient de rigueur. Il fallait bien payer les factures, le loyer et penser à son futur. Précisément son avenir immédiat étaient sombre, sa relation amoureuse avec James battait de l’aile et l'ambiance familiale ne valait guère mieux. Grâce à son amie Jasmine, elle travaille désormais pour une richissime famille russe, les Von Westmount, de leur vrai nom les Kroubetzkoy, pour s'occuper de leurs enfants, Alexander, Nikolas et la terrible Clémentine. L’autrice profite allègrement de ce portrait moderne d’une jeune femme ambitieuse chez les riches, pour inciser le canevas de nos soumissions quotidiennes si nécessaire au maintien d’une société inégalitaire. Ce n’est pas parce que la plume espiègle de l’autrice s’amuse à nous jouer des tours, à braquer la langue de Shakespeare, ou que le récit s’agite dans tous les sens, en territoire bourgeois, que nous ne sommes pas au centre du récit. Chacun.e en prend pour son grade. La rage couve, les murs de Wesmount tremblent, le feu menace au loin, l’autrice nous invite au pire, un verre de champagne à la main, le vin du diable. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Jules Clara.
60 min