Nouveau v379
Mission encre noire

Émission du 10 novembre 2020

Mission encre noire Tome 29 Chapitre 341. Brève histoire de la gauche politique au Québec par François Saillant avec une préface d'Alexandre Leduc paru en 2020 aux éditions Écosociété. D'après Alexandre Leduc, le député d'Hochelaga-Maisonneuve, membre fondateur de Québec Solidaire, ce livre «une remarquable pièce manquante dans notre historiographie politique». Abolition du travail des enfants, assurances chômage et maladie, droit à l'avortement, équité salariale, garderies publiques, gel des frais de scolarité, décriminalisation de l'homosexualité...font parti des fruits de luttes trop souvent oubliées, portées ou appuyées par la gauche politique. François Saillant, figure importante de la gauche québécoise des trente dernières années nous donne enfin la chance de pouvoir appréhender le récit controversé des années de 1880 à aujourd'hui, jusqu'à l'élection de 10 député.e.s solidaires en 2018. L'ancien coordonnateur et porte parole du FRAPRU pendant 38 ans et membre fondateur de Québec solidaire soumet la gauche à l'épreuve de son histoire. Cet essai s'interroge sur ses origines, ses acquis, ses échecs et les nombreux débats auxquels elle doit s'affronter pour  investir le terrain électoral et parlementaire. Ce livre s'avère une précieuse boussole en ces temps difficiles, alors que la plupart des partis européens de la gauche ont connu de récents reculs. Québec solidaire, en digne héritier de cette culture, est un exemple unique de succès en Amérique du nord. François Saillant est invité à Mission encre noire. Extrait: « Pour s'unir, il faut d'abord se démarquer.» Cette conception héritée de Lénine n'a pas seulement eu cours dans les organisations marxistes-léninistes des années 1970 qui , à force de vouloir afficher leurs différences, en venaient à s'exclure mutuellement en se traitant de « révisionnistes » ou d'« opportunistes »: elle a aussi marqué la gauche en général. Comment expliquer par exemple que, dans les années 1980, le Mouvement socialiste et le Regroupement pour le socialisme se soient longtemps ignorés ou méprisés, avant d'entamer un dialogue beaucoup trop tardif? Même quand des organisations se disaient prêtes à collaborer, elles étaient tout au plus disposées à parler d'unité d'action ou de coalitions électorales provisoires. Québec solidaire a emprunté le chemin inverse au moment de sa naissance et il continue encore aujourd'hui à le faire. Au lieu de chercher ce qui la divise, la gauche qui  y est regroupée mise sur ce qui la rassemble, sur ce qu'elle a en commun. Les débats de fond ne sont pas escamotés, ils sont généralement empreints du même esprit d'unité.»  Atlas littéraire du Québec sous la direction de Pierre Hébert, Bernard Andrès et Alex Gagnon paru en 2020 aux éditions Fidès. Pour mettre en route un tel projet il a fallu réunir des dizaines de chercheuses et de chercheurs durant trois années, provenant du Québec et d'ailleurs, y ajouter plus de 150 collaboratrices et collaborateurs. De cet odyssée téméraire à l'origine est né un magnifique objet n'ayant pour but éclairé que de vous proposer un voyage inédit et détaillé au coeur des lettres québécoises. 512 pages vous offrent la chance exceptionnelle de naviguer entre les récits de voyage, les courants littéraires, tendre la main sur des mots de Samuel Champlain, repartir sur les traces de Nelly Arcan, retracer les nouvelles tendances de chaque époque, chez les éditeurs, les poètes, les romanciers ainsi que de redécouvrir une liste non exhaustive des écrivaines et des écrivains qui ont fait et font le Québec littéraire. Drôle, curieux, surprenant, cet atlas vous donne à lire le monde littéraire québécois comme vous ne l'avez jamais encore lu auparavant. Pour comprendre l'ambition des auteurs autour de ce projet, je vous propose de parcourir cette histoire et ses multiples territoires, ses capsules et ses encadrés en compagnie de Bernard Andrès et Alex Gagnon à Mission encre noire. Extrait: « Capsule 157: France Théoret: être femme, c'est être à l'écoute de sa voix intérieure profonde. Femme libre et féministe engagée, France Théoret (née en 1942) a collaboré tour à tour è la barre du jour, Têtes de pioches et Spirale. Elle a publié, individuellement ou collectivement, de nombreux poèmes (vertiges, Intérieurs, La nuit de la muette, etc.), essais (entre raisons et déraison, Écrits au noir, etc.), morceaux pour le théâtre (« L'échantillon » dans la Nef des sorcières, Transit) récits de fiction courts (L'homme qui peignait Staline, etc.) et romans (Laurence, La femme du stalinien, Hôtel des quatre chemins, L'été sans erreur, Va et nous venge, etc.). Son oeuvre prolifique et protéiforme, commencée dans les années 1970 et couronnée en 2012 par le prix Athanase-David, se nourrit de son combat social, de ses rencontres, de ses expériences et de ses connaissances tout autant que de sa grande indépendance d'esprit et de sa sensibilité profonde. »

Feuille de route

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Mission encre noire 25 avril
Émission du 25 avril 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 407. Loger à la même adresse, conjuguer nos forces face à la crise du logement, l’isolement et la pauvreté par Gabrielle Anctil paru en 2023 aux éditions XYZ dans la collection Réparation. Plus de 80% de la population canadienne vit en ville selon statistique Canada en 2018, de 2001 à 2021. Le nombre de ménage composé de colocataires a augmenté de 54%, et en 2018 toujours, la Journée des communautés intentionnelles a accueilli près de 200 participant.es à Montréal. Si cette tendance coïncide avec le besoin de se loger pour moins cher devant l’augmentation abusive des loyers dans la métropole, elle révèle aussi le désir de s'offrir une autre manière de vivre. Au Québec, les nombreuses Premières Nations au pays ont vécu en communauté depuis la nuit des temps, la province possède également une longue histoire de collaboration à travers le tissu riche et variés de ses coopératives. Gabrielle Anctil vit depuis 14 ans dans une communauté intentionnelle nommé La cafétéria. Nourriture partagée, dépenses amorties en groupe, des corvées aux six semaines, des préparations de soupers collectifs deux fois par semaine font partie de sa routine de vie en communauté intentionnelle dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve à Montréal. Ce premier essai, affublé d’une clinquante couverture orangée, se veut autant un témoignage de première main qu’une boite à outil pour celles et ceux qui rêvent de vivre autrement, et qui désirent de changer radicalement de mode de vie. Comme le dit si bien l’écrivain de science fiction Alain Damasio, au lieu de rêver du grand soir, mieux vaut savoir bifurquer. Une attitude qui ouvre vers d’autres possibles collectifs, car une communauté intentionnelle s’est également envisager une autre façon de vivre socialement et politiquement ensemble. Je reçois, ce soir, à Mission encre noire, Gabrielle Anctil.
60 min
Mission encre noire 28 mars
Émission du 28 mars 2023
Mission encre noire Tome 37 chapitre 406. Jour encore, nuit à nouveau par Tristan Saule paru en 2023 aux éditions Le Quartanier dans la collection Parallèle Noir. Loïc ne sort plus de chez lui. Il scrute la place carrée par la lunette de sa carabine tchèque de calibre. 22. L'oeil collé au viseur, il observe la France déconfinée en mai 2020. Cela fait un an que Loïc n’a pas mis un pied dehors. Il voit bien la grande esplanade depuis son troisième étage du bâtiment B. Il n’en peut plus de se savoir menacé par le virus, les vaccins, les femmes, l’usine de métallurgie qui l’emploie. Heureusement il y a encore Nini, sa sœur qui est DRH chez Lapeyre, le spécialiste en menuiserie, elle lui fait ses courses. Sans oublier, Elora Silva, un des rares lien avec l’extérieur qui lui reste. Avec peut-être aussi quelques séances avec l’atelier de théâtre du quartier auquel il s’est inscrit. Il y retrouve Zineb et son délicat visage cerné par son hijab qu'il aime tant. Il va peu à peu perdre pied, être licencier, se couper de ses proches, entendre des voix, celles des personnages beckettiens de la pièce de théâtre qu’il écrit pour l’atelier, Clic et Cloque. Alors, il promène sa lunette de fusil vers la place, elle pointe vers son avenir, il a les larmes aux yeux. Roman sur la solitude, l’isolement, la difficulté de vivre le confinement, ce nouveau chapitre des Chroniques de la place carrée évoque le moisissement intérieur d’un homme et d’un monde ébranlé par la pandémie. Ce regard paranoïaque et menaçant qui balaie la place carrée se révèle un portrait frontal d’une France malade, qui a perdu ses repères. Nous embarquons ce soir pour ce thriller psychologique hypnotique en compagnie de Tristan Saule qui est notre invité à Mission encre noire.
60 min
Mission encre noire 14 mars
Émission du 14 mars 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 405. Cet exécrable corps, dissection de la grossophobie internalisée par Eli San paru en 2023 aux éditions Remue-ménage avec des illustrations de l’autrice. Si «ce corps me pousse à hurler», ce sont les premiers mots du texte, il permet aussi d’écrire sur la grossophobie ambiante. Il faut du cran lorsqu’on a mal à la peau, lorsque votre propre organisme vous dégoûte, lorsque votre morphologie devient une véritable prison, pour prendre la plume pour creuser plus profond. Tout en étant admiratrice de leur audace, et de la détermination du collectif, l’autrice avoue avoir de la difficulté à adhérer complètement au mouvement body positive, bien malgré elle. Aucune animosité à cela, de sa part, Eli San partage le même constat, les grosses personnes font l’objet d’une stigmatisation sociale omniprésente. La militante féministe et bibliothécaire montréalaise se met à nu, dans son intimité, dans son quotidien. Si personne n'ose vraiment le faire, l'autrice se réapproprie un champ d’expression de soi, au risque de déplaire. Parler de ses inconforts, des difficultés rencontrées dans sa vie amoureuses, de s’habiller à son goût, de monter des escaliers, bref, que ce soit dans la désinvolture ou l'aveu de faiblesse, Eli San est loin de vouloir se décourager, ni loin de vouloir blesser qui que ce soit. Ses confidences font mouche. Justement, parce que l’autrice s’y révèle vulnérable.Et dans ce miroir d’elle-même qu’elle nous tend, de toute cette haine de soi qui refait surface assurément, elle déclare la guerre aux préjugés: c’est le travail d’une vie. Pour en finir de vivre dans l’invisibilité j’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Eli San.
60 min
Mission encre noire 01 mars
Émission du 28 février 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 403. Cher Connard par Virginie Despentes paru en 2022 aux éditions Grasset. Oscar Jayack, un modeste romancier, ne pensait pas vraiment être lu par Rebecca Latté, une star de cinéma en fin de carrière, lorsqu’il publie un texte abjecte, sur Instagram. Et pourtant, sa réponse sous la forme d’une correspondance sera cinglante : Cher connard. Effacer sa publication n'y suffira pas, il lui admet son erreur. Elle n’a que faire de ses excuses mielleuses. Élevé dans les mêmes quartiers, être le frère de la meilleure amie de Rebecca dans les années 80, Corinne, n'y changera rien. Il a eu tort. Néanmoins, le dialogue va peu à peu s’instaurer. Ils ont en commun d’avoir grandi dans des banlieues ouvrières dont tout le monde se fout. Dans ce roman épistolaire, se dessine en creux un portrait accrocheur de deux solitudes, celui d’une génération engluée dans l’héritage patriarcal des années post-soixante-huitardes. Chacun.e englué.e dans diverses dépendances à l'alcool et aux drogues, se prennent le mouvement MeToo de plein fouet. «La vengeance des pétasses» comme le dit Oscar, contre le fameux mâle blanc. Alors que Zoé Katana, une ancienne attachée de presse d’édition le dénonce à son tour dans son blogue féministe radical, Oscar montre un autre visage. Et puis il y aura la COVID. Le confinement fait déambuler Rebecca et Virginie Despentes dans les rues vides d’un Paris qui a disparu. Cette ville, qu’elles connaissent si bien, n’est plus. Virginie Despentes se livre plus que jamais ici sur ses amours et ses intoxications aux drogues. Il est toujours grisant de retrouver ce ton si particulier, un mélange d'esprit contestataire et de regard critique sur notre époque porté par une voix badass. À celles et ceux qui la trouve radicale, elle rétorque : «la féminité est une prison et on en prend pour perpet.» Si Cher connard peu paraître un roman de la réconciliation, ne soyez pas dupes. Ce livre est une maison, celle de toutes les féministes, une décharge avec des rats et d’autres mauvaises filles. Punk as always, Cher Connard par Virginie Despentes paru en 2022 aux éditions Grasset.
60 min
Mission encre noire 15 février
Émission du 14 février 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 403. Mon fils ne revint que sept jours par David Clerson paru en 2023 aux éditions Héliotrope. Fin juin, ce matin là, une mère retrouve son fils qu’elle n’a pas vu depuis dix ans, au chalet familial en Mauricie, situé en pleine forêt. Elle y vit seule depuis sa retraite, ne recevant que de rares visites. Une fois passée la surprise, elle reconnaît son Mathias, devant sa porte, même s’il est devenu un homme plus grand que dans ses souvenirs. Tandis qu’ils marchent vers une tourbière, un lieu de refuge depuis l’enfance, Il va lui raconter sa vie d’errance. Une obsession l'accable sans cesse. L’idée persistante qu’une matière blanchâtre lui occupe le crâne et coule dans son corps, comme si elle voulait l’étouffer. Incapable de trouver sa place dans un monde qui s'agglomère en une gigantesque banlieue, il ne pense encore qu'à fuir. Pour sa mère, les journées sont belles en sa présence, malgré ce regard envoûtant de tourbière, qui parfois l'effraie. Comme la plupart de ses romans précédent, on retrouve chez l’auteur cette part d’étrangeté, de répétitions, de cycles où se combine un étrange cocktail de monstruosité, d’hallucination, d’égarement et de névrose qui plonge inlassablement le lectorat dans le doute et la curiosité. Je vous invite, ce soir, à glisser entre les branches, dans le chant assourdissant des rainettes et celui plus lourd des ouaouarons, je reçois David Clerson, à Mission encre noire.
60 min