Nouveau v379
Mission encre noire

Émission du 22 octobre 2019

Mission encre noire Tome 27 Chapitre 320. Philosophie du Hip Hop, des origines à Lauryn Hill de Jérémie McEwen paru en 2019 aux éditions XYZ. «Got to give us what we want/Gotta give us what we need.» Qui aurait pu croire qu'un jour, cette tirade du Fight the power de Public Ennemy, serait mise en parallèle avec la pensée de Carl Schmitt, le philosophe allemand ? Qui aurait eu l'idée de rapprocher le Fuck the police de N.W.A et l'anglais Thomas Hobbes ? Jérémie McEwen bien sûr, le professeur de philosophie et spécialiste du rap vous offre un essai passionnant en bâtissant des ponts entre la philosophie occidentale traditionnelle et le hip-hop américain. Des ruelles taggées de Montréal aux émeutes de Los Angeles, l'auteur fait un détour par les arcanes ombragées de l'acropole ou des boudoirs humides de l'Europe de l'est pour compléter le tableau d'une aventure rafraîchissante, frénétique et rythmée. Depuis sa naissance du côté du Bronx, du Queens et de Brooklyn à nos jours, le hip-hop a muté. Si son âge d'or remonte aux années 80, La philosophie du hip-hop va vous prouver que ce mouvement social et musical a su se redéfinir. J'invite les novices et les initié.e.s à rencontrer le MC d'un soir, à Mission encre noire, Jérémie McEwen est notre invité. Extrait: «Jusqu'alors, il demeurait encore possible de penser que le hip-hop n'était qu'une mode qui passerait. KRS-One et Rakim, malgré leur poids philosophique imposant, n'ont jamais véritablment percé hors de la communauté hip-hop elle-même. Et malgré leur importance dans l'histoire de la musique populaire, Run-DMC ne représentait aucune menace réelle pour la société américaine, en épousant, sur leur premier grand succès commercial, le rock d'Aerosmith (Walk This way, pièce à laquelle collaborent les deux groupes en 1986). Mais avec Public Ennemy sur la côte est, et N.W.A sur la côte ouest, il devenait manifeste que tout avait changé. Une confrontation sociale devenait inévitable, et le vent du changement soufflait. N.W.A avait décidé de suivre les règles de l'état de nature, comme le commandait la logique des gangs de Los Angeles - j'y reviendrai. Pour Public Ennemy, le but était assez différent: il s'agissait d'investir la sphère politique et de changer les règles de la société établie.» Manam de Rima Elkouri paru en 2019 aux éditions Boréal. Enfant, La Téta de Léa a vu ce qu'un enfant ne devrait pas voir. 1915, est la date du Ermeni Soykırımı le génocide arménien au cours duquel les deux tiers du peuple vivant sur le territoire actuel de la Turquie sont massacrés et déportés. Cette grand-mère, qui a survécu et immigré au Québec en 1957, vient de décéder à Montréal, elle laisse une marque indélébile dans la vie de sa petite fille. Celle-ci décide de retourner sur les pas de ses ancêtres, de ce peuple surnommé atrocement par les turcs, «les restes de l'épée». Accompagnée par Sam, son guide, un cinéaste kurde qu'une amie a rencontré a Istanbul. Institutrice, Léa, après avoir passée une dernière journée avec ses élèves, s'élance vers la ville natale de sa famille, Yalla ! Manam accrochée à flanc de montagne, ses minarets implorant le ciel, lui tend les bras. Voici un premier roman qui coincide étrangement avec l'actualité de ces derniers jours et la répression qui sévit contre le peuple kurde sur la frontière avec la Syrie. Manam, sous la plume vive de son autrice, journaliste reconnue à La Presse, raconte une terrible tragédie qui vous fera suivre de sinistres caravansérails et partager l'exil de force de familles décimées. Pourtant, même si la mort guette à tout instant la mémoire, la vie se passe, avec ses couleurs, ses odeurs de Klichas, et la tendresse du souvenir de Léa pour sa Téta. Rima Elkouri est invitée à Mission encre noire. Extrait: «Le refuge d'hier est devenu brasier. Cent ans plus tard, l'exode se fait dans le sens inverse de celui que mes grands-parents ont connu en 1915. Des réfugiés syriens affluent vers la frontière turque. Et le printemps, le vrai, se fait toujours attendre. Depuis le début de ce conflit, je parcours les nouvelles d'Alep avec effroi. Le souk ravagé par les flammes des combats. Le minarets de la mosquée des Omeyyades qui  s'effondre. Sa cour intérieure transformée en fosse commune. Les morts qui s'empilent dans l'indifférence. Lorsque je regarde mes photos d'Alep, j'ai cette impression d'avoir immortalisé une façade fissurée juste avant qu'elle ne s'écroule. Tous mes souvenirs sont aujourd'hui éparpillés sous des cendres. dans les ruines, à côté des cadavres, ils ont l'air indécents.»  

Feuille de route

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Mission encre noire 27 juin
Émission du 27 juin 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 412. Troubles, nos ombres un collectif dirigé par Jennifer Bélanger paru en 2023 aux éditions Triptyque dans la collection Queer. La colère ne se tarit pas dixit l’autrice. De l’élaboration de ce projet à l’été 2020, à son achèvement en 2022, Safia Nolin deviendra la bête noire des réseaux sociaux malgré son récit d’agressions subies de la part de Maripier Morin, la montée de la droite aux États-Unis et celles des conservatismes en général dans le monde, dès lors menace les droits fondamentaux des personnes minorisées. Les textes réunis ici par Jennifer Bélanger offre un espace sécuritaire à 11 artistes non seulement pour témoigner de l’urgence de dire les dangers qui guettent les personnes LGBTQ2IA+, mais également pour nous partager des récits de vie poignants. Qu’il s’agisse d’amitié, de rapports amoureux, de désirs, de colère, de résistance, Étienne Bergeron, Julie Bosman, Marilou Craft, Nicholas Dawson, Martine Delvaux, Sandrine Galand, Maude Lafleur, Mael Maréchal, Roxane Nadeau, Mélanie O’Bomsawin et Justina Uribe se réunissent sous l’ombre lumineuse et créatrice de Jennifer Bélanger, qui est mon invité, ce soir, à Mission encre noire.
60 min
Mission encre noire 06 juin
Émission du 6 juin 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 411. Mise en forme par Mikella Nicol paru en 2023 aux éditions Le Cheval D’août. À la suite d’une rupture amoureuse encore fraîche et de l’aménagement en catastrophe chez un ami, la narratrice se jette à corps perdu dans l’entraînement physique. Malgré que son corps deviennent de plus en plus performant, la dépression gagne du terrain, il y a toujours quelque chose qui cloche. Ce qui s’impose très vite comme la seule activité encore valable à ses yeux va devenir un sujet de réflexion tenace. Et si, en dépit des injonctions bénéfiques assénées par les vidéos de fitness, les programmes de remises en forme n’étaient que la partie émergée d’une problématique plus vaste. Pour l’autrice l’idée jaillit en croisant un inconnu malveillant dans la rue. Le lien qui unit violence et beauté ne fait plus aucun doute. Ou comment l’industrie du fitness, entre autre, confirme la main mise d'une esthétique patriarcale, coloniale et fossile, sur le discours ambiant, dixit Paul B. Preciado. On peut se demander, ici, comment un tel système, qui vise la soumission collective totale des corps, se met-il en place ? Les femmes en particulier, tels des objets inoffensifs, se doivent de collaborer, bien entendu, à leur corps défendant, à des modèles hétérosexuels astreignants. Ce livre à mi-chemin de l’essai et du récit autobiographique laisse libre court à une parole qui refuse de rentrer dans le moule. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Mikella Nicol.
60 min
Mission encre noire 23 mai
Émission du 23 mai 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 410. Daniel Grenier Héroïnes et tombeaux paru en 2023 aux éditions Héliotrope. Alexandra Pearson, originaire du Tennessee, lit le New York Times dans cette ville secondaire brésilienne à l’ouest de Porto Alegre : Uruguaiana. Aujourd’hui journaliste, la jeune femme qui avait cheminé aux côté de Françoise dans le roman précédent de l’auteur, part à la recherche, cent ans plus tard, d’un étrange personnage, Ambrose Bierce, auteur du Dictionnaire du diable. Il serait mort fusillé en 1915 au Mexique et réapparu, bien vivant, à des milliers de kilomètres plus loin. Pour cela, elle devra mettre la main sur un manuscrit inédit. Pendant ce temps, comme l’annonce le journal, une certaine Helen Klaben décède à l’âge de 76 ans. Autrefois, elle a fait la Une du Life magazine, le 12 avril 1963, après avoir survécu 49 jours dans le froid du Yukon suite au crash de leur avion le 3 février 1963. Étrange coïncidence, ce nom, lui semble familier. Il lui remémore un souvenir amer, celui de Françoise, cette fille à qui elle n’a fait que mentir. À l’époque elle se faisait appeler Samantha. Dans ce troisième livre qui se veut un hommage à Ernesto Sabato, l’auteur nous entraîne dans un étrange roman d’aventures dans lequel il explore une fois encore le territoire américain et il s’interroge sur la responsabilité de celui qui raconte les histoires des autres. Sur un air de Carioca, j’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Daniel Grenier.
60 min
Mission encre noire 16 mai
Émission du 16 mai 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 409. Exercices de joie par Louise Dupré paru en 2023 aux éditions du Noroît. Dernier fascicule du triptyque traitant des possibilités du poétique face à l’horreur et à la détresse entamé avec Plus haut que les flammes en 2010 puis La main hantée en 2016, Exercices de joie présente la poète fébrile, les côtes friables, hantée par des rêves qui la réveillent la nuit. Toutefois Louise Dupré n'abdique pas pour autant. Elle revendique le désir de se tenir debout devant un paysage en ruines quitte à s'accrocher à ses mots comme à une bouée. Car, s'il est peut-être vain de vouloir comprendre l’envers du monde quand le temps fuit entre nos doigts, pourquoi ne pas apprivoiser les douleurs, en oublier la piqûre de l’aiguille. L’écriture, telle une veine fragile qui palpite encore, se mue en écorce revêche, pour combattre en prose et en vers. Si la suie de Birkenau ou de Auschwitz la poursuit encore, si l’ombre de la main coupable du second recueil habite encore les pages, les poèmes explorent ici une autre voie, plus apaisée. Celle de la douceur, celle de la joie, que l'autrice défini comme cet instant précieux et rare ou le cœur module ses élans. Il est du devoir de la poète de donner à voir cette faible clarté bienveillante qui conduit sa main. Certes, le cercle des poètes disparus s’agrandit un peu plus chaque jour, le monde chancelle ; non, elle ne vacillera pas ; l’autrice appartient à la généalogie des femmes qui n’ont jamais renoncé. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Louise Dupré.
60 min
Mission encre noire 02 mai
Émission du 2 mai 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 408. Le plein d’ordinaire par Étienne Tremblay paru en 2023 aux éditions Les Herbes Rouges. Asti qu’était belle! se dit Mathieu alors qu'il entre dans le Pétro sur le boulevard qui mène vers Longueuil, proche de l’usine Weston. Elle, c’est Val, sa future collègue que l’adolescent de Boucherville va chercher désespérément à séduire. Le futur cégépien est persuadé d’être promis à un grand destin de poète, cela sera-t-il suffisant pour elle? En attendant, il travaille de nuit dans une station-service à distance de vélo de chez lui. Une job parfaite qui lui permet de lire à sa guise, de consommer ses trois gammes de pot, de voler des cigarettes et de manger à volonté. Mathieu illustre à merveille la chronique ordinaire d’un ados de banlieue des années 2000. Une jeunesse qui se mélange, qui se passionne, qui se voit un avenir exceptionnel, qui rêve la vie en grand plutôt qu’à travers le miroir aveugle de l’écran noir d’un cellulaire. Mathieu n’a rien de différent des autres, si ce n’est l’élan que lui procure une sensibilité exacerbée et un certain goût du risque. Des excès qui fatalement se fracasseront contre le mur des réalités. Voici un roman initiatique qui relate l’aventure épisodique, très attachante, d’un jeune homme en quête de lui-même, pris au centre de son univers sensible, près à devenir un autre Mathieu, même s'il ne sait pas très bien encore à quoi cela ressemblera. J’accueille, ce soir à Mission encre noire, Étienne Tremblay.
60 min