Nouveau v379
Mission encre noire

Émission du 11 mai 2021

Mission encre noire Tome 31 Chapitre 358. La désidérata par Marie-Hélène Poitras paru en 2021 aux éditions Alto. Alouette, gentille alouette, Alouette, je te plumerai. Aliénor sourit malicieusement, elle a soif de justice. Depuis le bois, elle observe le domaine de Malmaison, elle, qui fait jaillir la vie animale et végétale de ses mains. Un lourd secret entoure le village de Noirax. Un silence drape l’héritage de la lignée des pères Berthoumieux, tous, l'exacte réplique du même homme. Les alcools et la bonne chair ne font qu’illusion, l’éternel souvenir de la dernière épouse repose dans la maison aux parfums, fermée à double tour sur une vérité qui dérange et menace. Pampelune, la bougresse, Héléna, la Pimparela, connaissent bien le cycle des amours déçus, des chagrins qui rongent, des enfants illégitimes. D'espoirs en défaites, c'est une rengaine d'une grande tristesse. Cependant, la rumeur se propage au village, le charme d'Aliénor agit comme un puissant parfum et se répand comme une fièvre. Le fils Berthoumieux s'en émoustille déjà. Un nouveau règne est en marche. Presque dix ans après la publication de Griffintown, Marie-Hélène Poitras lève le rideau sur ces voix que l’on tente de bâillonner. Je vous propose de nous faufiler au travers des secrets entortillés autour des racines de cette forêt et d’en animer ses marionnettes d’une main tremblante. L'autrice l'affirme : les loups sont parmi nous ! Je reçois Marie-Hélène Poitras, à Mission encre noire. Extrait:« Il y a quelques années, quand Jeanty avait quatorze ans, une nuit alors que son père dormait, il était monté au grenier et était tombé nez à nez avec un grand miroir ovale sur pied. Ce qu'il découvrit dans le reflet de la psyché le dégoûta. La ressemblance avec son père s'installait. En plus de la couleur des yeux et du nez aquilin, sur son visage les traits distinctifs des Berthoumieux commençaient à l'emporter sur la douceur de ceux de Pampelune. Le duvet au-dessus de sa lèvre, la carrure plus marquée des épaules, l'élargissement du muscle trapèze et, surtout, ce je-ne-sais-quoi d'un peu débile que les pères Berthoumieux affichaient sur leur portrait, tous ces attributs étaient en train de poindre en lui. Le constat était inévitable, la transformation bien amorcée: il ressemblait à son père. N'en pouvant plus, Jeanty tourna la psyché à l'envers. Ce qu'il découvrit de l'autre côté du miroir l'émerveilla.» La revue Moebius 168-169, Depuis la crise. Enfin ! Il est annoncé depuis quelques mois déjà, le numéro double de la revue Moebius est désormais disponible. Cette nouvelle édition, avec à la barre Stéphanie Roussel et Nicholas Dawson, se propose de renverser les tendances et de bousculer les idées reçues. À travers un thème de circonstance: Depuis la crise, le duo se propose de résister à l’isolement, de briser «les fils invisibles des confinements successifs», pour en faire un moment de solidarité et d'ouverture. Autant dire que le pari est amplement réussi par la qualité des textes publiés, mais également par le souci de variétés des sujets et des expériences de lecture offert par le comité de rédaction. Au programme de ce Moebius: Rébecca Déraspe, Katia Belkhodja, Dalie Giroux, Sandrine Galand, Marie-Christine Lemieux-Couture, Kama La Mackerel, Mishka Lavigne, Laurence Olivier, Cato Fortin, Emmanuella Feix, Si Poirier, Sophie Bélair Clément nous parle de création en temps de crise. Moebius accueille dans ses pages, pour quatre numéros, Ouanessa Younsi et Awa Banmana, en tant qu'écrivaine et artiste en résidence. Et enfin Marie-Ève Lacasse se charge de la traditionnelle lettre à une écrivaine vivante. Pour en savoir plus sur ce sommaire Stéphanie Roussel et Nicholas Dawson sont invité.e.s à Mission encre noire. Extrait:« Je fais une liste de ce que la décapitation n'est pas: une fusillade, un attentat à la voiture piégée, une bombe, un démembrement, un égorgement, une plainte académique. Je fais une liste de ce que la décapitation n'est pas, ça commence comme beaucoup de listes à cause des journaux et des statuts dans lesquels personne, jamais, n'a eu peur d'être décapité. Là où j'ai grandi, les embaumeurs apprenaient à recoudre les têtes sur les cadavres. Là où j'ai grandi, des barbus se transformaient en guillotines, on les appelait nos frères.» katia Belkhodja, Moutabarridja, p45, Moebius 168-169.

Feuille de route

Tous les épisodes

Mission encre noire 27 juin
Émission du 27 juin 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 412. Troubles, nos ombres un collectif dirigé par Jennifer Bélanger paru en 2023 aux éditions Triptyque dans la collection Queer. La colère ne se tarit pas dixit l’autrice. De l’élaboration de ce projet à l’été 2020, à son achèvement en 2022, Safia Nolin deviendra la bête noire des réseaux sociaux malgré son récit d’agressions subies de la part de Maripier Morin, la montée de la droite aux États-Unis et celles des conservatismes en général dans le monde, dès lors menace les droits fondamentaux des personnes minorisées. Les textes réunis ici par Jennifer Bélanger offre un espace sécuritaire à 11 artistes non seulement pour témoigner de l’urgence de dire les dangers qui guettent les personnes LGBTQ2IA+, mais également pour nous partager des récits de vie poignants. Qu’il s’agisse d’amitié, de rapports amoureux, de désirs, de colère, de résistance, Étienne Bergeron, Julie Bosman, Marilou Craft, Nicholas Dawson, Martine Delvaux, Sandrine Galand, Maude Lafleur, Mael Maréchal, Roxane Nadeau, Mélanie O’Bomsawin et Justina Uribe se réunissent sous l’ombre lumineuse et créatrice de Jennifer Bélanger, qui est mon invité, ce soir, à Mission encre noire.
60 min
Mission encre noire 06 juin
Émission du 6 juin 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 411. Mise en forme par Mikella Nicol paru en 2023 aux éditions Le Cheval D’août. À la suite d’une rupture amoureuse encore fraîche et de l’aménagement en catastrophe chez un ami, la narratrice se jette à corps perdu dans l’entraînement physique. Malgré que son corps deviennent de plus en plus performant, la dépression gagne du terrain, il y a toujours quelque chose qui cloche. Ce qui s’impose très vite comme la seule activité encore valable à ses yeux va devenir un sujet de réflexion tenace. Et si, en dépit des injonctions bénéfiques assénées par les vidéos de fitness, les programmes de remises en forme n’étaient que la partie émergée d’une problématique plus vaste. Pour l’autrice l’idée jaillit en croisant un inconnu malveillant dans la rue. Le lien qui unit violence et beauté ne fait plus aucun doute. Ou comment l’industrie du fitness, entre autre, confirme la main mise d'une esthétique patriarcale, coloniale et fossile, sur le discours ambiant, dixit Paul B. Preciado. On peut se demander, ici, comment un tel système, qui vise la soumission collective totale des corps, se met-il en place ? Les femmes en particulier, tels des objets inoffensifs, se doivent de collaborer, bien entendu, à leur corps défendant, à des modèles hétérosexuels astreignants. Ce livre à mi-chemin de l’essai et du récit autobiographique laisse libre court à une parole qui refuse de rentrer dans le moule. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Mikella Nicol.
60 min
Mission encre noire 23 mai
Émission du 23 mai 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 410. Daniel Grenier Héroïnes et tombeaux paru en 2023 aux éditions Héliotrope. Alexandra Pearson, originaire du Tennessee, lit le New York Times dans cette ville secondaire brésilienne à l’ouest de Porto Alegre : Uruguaiana. Aujourd’hui journaliste, la jeune femme qui avait cheminé aux côté de Françoise dans le roman précédent de l’auteur, part à la recherche, cent ans plus tard, d’un étrange personnage, Ambrose Bierce, auteur du Dictionnaire du diable. Il serait mort fusillé en 1915 au Mexique et réapparu, bien vivant, à des milliers de kilomètres plus loin. Pour cela, elle devra mettre la main sur un manuscrit inédit. Pendant ce temps, comme l’annonce le journal, une certaine Helen Klaben décède à l’âge de 76 ans. Autrefois, elle a fait la Une du Life magazine, le 12 avril 1963, après avoir survécu 49 jours dans le froid du Yukon suite au crash de leur avion le 3 février 1963. Étrange coïncidence, ce nom, lui semble familier. Il lui remémore un souvenir amer, celui de Françoise, cette fille à qui elle n’a fait que mentir. À l’époque elle se faisait appeler Samantha. Dans ce troisième livre qui se veut un hommage à Ernesto Sabato, l’auteur nous entraîne dans un étrange roman d’aventures dans lequel il explore une fois encore le territoire américain et il s’interroge sur la responsabilité de celui qui raconte les histoires des autres. Sur un air de Carioca, j’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Daniel Grenier.
60 min
Mission encre noire 16 mai
Émission du 16 mai 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 409. Exercices de joie par Louise Dupré paru en 2023 aux éditions du Noroît. Dernier fascicule du triptyque traitant des possibilités du poétique face à l’horreur et à la détresse entamé avec Plus haut que les flammes en 2010 puis La main hantée en 2016, Exercices de joie présente la poète fébrile, les côtes friables, hantée par des rêves qui la réveillent la nuit. Toutefois Louise Dupré n'abdique pas pour autant. Elle revendique le désir de se tenir debout devant un paysage en ruines quitte à s'accrocher à ses mots comme à une bouée. Car, s'il est peut-être vain de vouloir comprendre l’envers du monde quand le temps fuit entre nos doigts, pourquoi ne pas apprivoiser les douleurs, en oublier la piqûre de l’aiguille. L’écriture, telle une veine fragile qui palpite encore, se mue en écorce revêche, pour combattre en prose et en vers. Si la suie de Birkenau ou de Auschwitz la poursuit encore, si l’ombre de la main coupable du second recueil habite encore les pages, les poèmes explorent ici une autre voie, plus apaisée. Celle de la douceur, celle de la joie, que l'autrice défini comme cet instant précieux et rare ou le cœur module ses élans. Il est du devoir de la poète de donner à voir cette faible clarté bienveillante qui conduit sa main. Certes, le cercle des poètes disparus s’agrandit un peu plus chaque jour, le monde chancelle ; non, elle ne vacillera pas ; l’autrice appartient à la généalogie des femmes qui n’ont jamais renoncé. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Louise Dupré.
60 min
Mission encre noire 02 mai
Émission du 2 mai 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 408. Le plein d’ordinaire par Étienne Tremblay paru en 2023 aux éditions Les Herbes Rouges. Asti qu’était belle! se dit Mathieu alors qu'il entre dans le Pétro sur le boulevard qui mène vers Longueuil, proche de l’usine Weston. Elle, c’est Val, sa future collègue que l’adolescent de Boucherville va chercher désespérément à séduire. Le futur cégépien est persuadé d’être promis à un grand destin de poète, cela sera-t-il suffisant pour elle? En attendant, il travaille de nuit dans une station-service à distance de vélo de chez lui. Une job parfaite qui lui permet de lire à sa guise, de consommer ses trois gammes de pot, de voler des cigarettes et de manger à volonté. Mathieu illustre à merveille la chronique ordinaire d’un ados de banlieue des années 2000. Une jeunesse qui se mélange, qui se passionne, qui se voit un avenir exceptionnel, qui rêve la vie en grand plutôt qu’à travers le miroir aveugle de l’écran noir d’un cellulaire. Mathieu n’a rien de différent des autres, si ce n’est l’élan que lui procure une sensibilité exacerbée et un certain goût du risque. Des excès qui fatalement se fracasseront contre le mur des réalités. Voici un roman initiatique qui relate l’aventure épisodique, très attachante, d’un jeune homme en quête de lui-même, pris au centre de son univers sensible, près à devenir un autre Mathieu, même s'il ne sait pas très bien encore à quoi cela ressemblera. J’accueille, ce soir à Mission encre noire, Étienne Tremblay.
60 min