Nouveau v379
Mission encre noire

Émission du 4 février 2020

Mission encre noire Tome 28 Chapitre 328 Guérir du mal de l'infini de Yves-Marie Abraham paru en 2019 aux éditions Écosociété Collection Polémos Combattre, débattre. « Nous sommes une armée de rêveurs (rêveuses) et pour cette raison nous sommes invincibles. » Zadistes. Le 16 octobre 2012, le gouvernement Ayrault lance « l’opération César » qui a pour but d’évacuer, par la force, Notre-Dame-des-Landes et d’en chasser les occupants qui s’opposent au projet de construction de l’aéroport. Le 17 janvier 2018, le projet est officiellement abandonné. Le succès de cette tentative de «communaliser» ce bout de territoire en France ne doit pas occulter le prix de la violence d'État qu'il aura fallu payer. L'ambition révolutionnaire qui habite cet essai est avant tout de faire prendre conscience de l'urgence de comprendre qu'il n'y aura pas de «développement durable». Le monde tel qu'il a été conçu jusqu'ici nous éloigne sans cesse des idéaux de liberté et d'égalité. Notre civilisation est en danger, ce qui la menace porte un nom: la croissance économique, voilà le «mal de l'infini». Yves-Marie Abraham jette un éclairage avisé sur ce phénomène pour tenter d'en comprendre les mécanismes. Pourquoi refuser la croissance? Comment faire ? Pour enrayer cette machine infernale l'auteur fait valoir trois principes: produire moins, partager plus, décider ensemble. Pour lui, seule la décroissance peut nous permettre de surmonter la catastrophe annoncée. Guérir du  mal de l'infini fait l'éloge d'un monde fondé sur les communs, un concept qui plante son écharde dans le flanc de l'inévitable course au rendement. Je reçois Yves-Marie Abraham à Mission encre noire, ce soir. Extrait: « Si nous voulons vraiment cesser d'aggraver la catastrophe écologique, pour éviter entre autres d'avoir à subir à court ou moyen terme une forme de décroissance subie et sauvage, conséquence du dépassement des limites biophysiques planétaires, la seule solution est de produire moins qu'on ne le fait aujourd'hui. Il faut non seulement renoncer à la croissance, mais réduire la quantité de matière et d'énergie que nous générons. Tel devrait être le premier principe de toute politique écologique digne de ce nom. Malheureusement, bien des écologistes, ceux en particulier dont l'engagement est aussi devenu un gagne-pain, continuent à ne pas faire valoir clairement cet impératif et préfèrent nourrir l'espoir que les stratégies dont il a été question dans les pages qui précèdent vont suffire à stopper le désastre. mais celles-ci n'auront une quelconque efficacité sur le plan écologique que dans la mesure où des limites auront été fixées à ce que l'on peut produire et consommer. Sinon, elles permettront au mieux de « polluer moins pour polluer plus longtemps ». Au pire, elles auront pour effet de nourrir la croissance (C'est le « paradoxe de Jevons ») et par conséquent d'accélérer la dévastation de notre planète. Il est urgent qu'au moins nos « leaders environnementaux » cessent d'être les commis voyageurs du « capitalisme vert », spécialisés dans la promotion de marchandises « propres ». » Hollywood et la politique de Claude Vaillancourt paru en 2020 aux éditions Écosociété. « That's all folks !» C'est la phrase de la Warner Bros' classic Looney Tunes cartoon, rendu célèbre par Porky the pig. Claude Vaillancourt ne voulait pas pour autant tirer un trait final à son essai paru originellement en 2012. Dans cette version augmentée, l'histoire s'accélère et bien de nouveaux enjeux ont changé quelque peu la donne dans le milieu du cinéma aux États-Unis. L'auteur nous invite à une visite guidée au royaume d'Hollywood en envisageant la critique de ce cinéma des années 1980 à aujourd'hui. Illustré par de nombreux exemples, cet essai nous introduit au coeur de l'univers d'une industrie puissante vendue au sacro saint capitalisme. Cet ouvrage se présente comme une réflexion sur les liens entre la politique et l'imaginaire hollywoodien. À l'image du Petit cours d'autodéfense intellectuelle de Normand Baillargeon (Lux, 2005), Hollywood et la politique vous donne les outils pour aiguiser votre sens critique sur un cinéma qui, néanmoins, diffuse toujours un pouvoir de fascination extraordinaire sur l'ensemble du globe. Qu'est-ce qui peut bien distinguer des oeuvres comme Rocky IV de Sylvester Stallone (1985), Fight club de David Fincher (1999) et Super size me de Morgan Spurlock (2004) ? je vous incite à venir le découvrir, ce soir, à Mission encre noire, Claude Vaillancourt est notre invité. Extrait: « Le début de Blue Velvet (1986) de David Lynch est devenu un classique pour les cinéphiles. Au retour d'une visite à l'hôpital, un jeune homme aperçoit une oreille humaine dans un terrain vague. Cette trouvaille inusitée contraste avec l'univers rassurant dans lequel évolue le jeune homme. Les premières images du film ont montré une banlieue souriante et paisible: apparaissent aux yeux du spectateur une jolie clôture blanche devant laquelle poussent des roses, un camion de pompiers qui circule lentement avec un pompier qui envoie gentiment la main, des enfants qui traversent la rue sous le regard protecteur d'une brigadière, une coquette maison avec une grosse voiture dans l'entrée. certes, un homme qui arrose sa pelouse est victime d'un arrêt cardiaque. mais il sera bien soigné par la suite. Le mal ne vient pas de là, mais de cette oreille coupée, ramassée par le jeune homme, véritable apparition de l'incongru dans un monde ordonné. L'oreille nous apprend que l'univers lisse et calme de cette banlieue ordinaire cache aussi son envers: un sadique, un fou a bel et bien coupé l'oreille d'un individu, après l'avoir violenté et tué peut-être.» 

Feuille de route

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Mission encre noire 23 mai
Émission du 23 mai 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 410. Daniel Grenier Héroïnes et tombeaux paru en 2023 aux éditions Héliotrope. Alexandra Pearson, originaire du Tennessee, lit le New York Times dans cette ville secondaire brésilienne à l’ouest de Porto Alegre : Uruguaiana. Aujourd’hui journaliste, la jeune femme qui avait cheminé aux côté de Françoise dans le roman précédent de l’auteur, part à la recherche, cent ans plus tard, d’un étrange personnage, Ambrose Bierce, auteur du Dictionnaire du diable. Il serait mort fusillé en 1915 au Mexique et réapparu, bien vivant, à des milliers de kilomètres plus loin. Pour cela, elle devra mettre la main sur un manuscrit inédit. Pendant ce temps, comme l’annonce le journal, une certaine Helen Klaben décède à l’âge de 76 ans. Autrefois, elle a fait la Une du Life magazine, le 12 avril 1963, après avoir survécu 49 jours dans le froid du Yukon suite au crash de leur avion le 3 février 1963. Étrange coïncidence, ce nom, lui semble familier. Il lui remémore un souvenir amer, celui de Françoise, cette fille à qui elle n’a fait que mentir. À l’époque elle se faisait appeler Samantha. Dans ce troisième livre qui se veut un hommage à Ernesto Sabato, l’auteur nous entraîne dans un étrange roman d’aventures dans lequel il explore une fois encore le territoire américain et il s’interroge sur la responsabilité de celui qui raconte les histoires des autres. Sur un air de Carioca, j’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Daniel Grenier.
60 min
Mission encre noire 16 mai
Émission du 16 mai 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 409. Exercices de joie par Louise Dupré paru en 2023 aux éditions du Noroît. Dernier fascicule du triptyque traitant des possibilités du poétique face à l’horreur et à la détresse entamé avec Plus haut que les flammes en 2010 puis La main hantée en 2016, Exercices de joie présente la poète fébrile, les côtes friables, hantée par des rêves qui la réveillent la nuit. Toutefois Louise Dupré n'abdique pas pour autant. Elle revendique le désir de se tenir debout devant un paysage en ruines quitte à s'accrocher à ses mots comme à une bouée. Car, s'il est peut-être vain de vouloir comprendre l’envers du monde quand le temps fuit entre nos doigts, pourquoi ne pas apprivoiser les douleurs, en oublier la piqûre de l’aiguille. L’écriture, telle une veine fragile qui palpite encore, se mue en écorce revêche, pour combattre en prose et en vers. Si la suie de Birkenau ou de Auschwitz la poursuit encore, si l’ombre de la main coupable du second recueil habite encore les pages, les poèmes explorent ici une autre voie, plus apaisée. Celle de la douceur, celle de la joie, que l'autrice défini comme cet instant précieux et rare ou le cœur module ses élans. Il est du devoir de la poète de donner à voir cette faible clarté bienveillante qui conduit sa main. Certes, le cercle des poètes disparus s’agrandit un peu plus chaque jour, le monde chancelle ; non, elle ne vacillera pas ; l’autrice appartient à la généalogie des femmes qui n’ont jamais renoncé. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Louise Dupré.
60 min
Mission encre noire 02 mai
Émission du 2 mai 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 408. Le plein d’ordinaire par Étienne Tremblay paru en 2023 aux éditions Les Herbes Rouges. Asti qu’était belle! se dit Mathieu alors qu'il entre dans le Pétro sur le boulevard qui mène vers Longueuil, proche de l’usine Weston. Elle, c’est Val, sa future collègue que l’adolescent de Boucherville va chercher désespérément à séduire. Le futur cégépien est persuadé d’être promis à un grand destin de poète, cela sera-t-il suffisant pour elle? En attendant, il travaille de nuit dans une station-service à distance de vélo de chez lui. Une job parfaite qui lui permet de lire à sa guise, de consommer ses trois gammes de pot, de voler des cigarettes et de manger à volonté. Mathieu illustre à merveille la chronique ordinaire d’un ados de banlieue des années 2000. Une jeunesse qui se mélange, qui se passionne, qui se voit un avenir exceptionnel, qui rêve la vie en grand plutôt qu’à travers le miroir aveugle de l’écran noir d’un cellulaire. Mathieu n’a rien de différent des autres, si ce n’est l’élan que lui procure une sensibilité exacerbée et un certain goût du risque. Des excès qui fatalement se fracasseront contre le mur des réalités. Voici un roman initiatique qui relate l’aventure épisodique, très attachante, d’un jeune homme en quête de lui-même, pris au centre de son univers sensible, près à devenir un autre Mathieu, même s'il ne sait pas très bien encore à quoi cela ressemblera. J’accueille, ce soir à Mission encre noire, Étienne Tremblay.
60 min
Mission encre noire 25 avril
Émission du 25 avril 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 407. Loger à la même adresse, conjuguer nos forces face à la crise du logement, l’isolement et la pauvreté par Gabrielle Anctil paru en 2023 aux éditions XYZ dans la collection Réparation. Plus de 80% de la population canadienne vit en ville selon statistique Canada en 2018, de 2001 à 2021. Le nombre de ménage composé de colocataires a augmenté de 54%, et en 2018 toujours, la Journée des communautés intentionnelles a accueilli près de 200 participant.es à Montréal. Si cette tendance coïncide avec le besoin de se loger pour moins cher devant l’augmentation abusive des loyers dans la métropole, elle révèle aussi le désir de s'offrir une autre manière de vivre. Au Québec, les nombreuses Premières Nations au pays ont vécu en communauté depuis la nuit des temps, la province possède également une longue histoire de collaboration à travers le tissu riche et variés de ses coopératives. Gabrielle Anctil vit depuis 14 ans dans une communauté intentionnelle nommé La cafétéria. Nourriture partagée, dépenses amorties en groupe, des corvées aux six semaines, des préparations de soupers collectifs deux fois par semaine font partie de sa routine de vie en communauté intentionnelle dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve à Montréal. Ce premier essai, affublé d’une clinquante couverture orangée, se veut autant un témoignage de première main qu’une boite à outil pour celles et ceux qui rêvent de vivre autrement, et qui désirent de changer radicalement de mode de vie. Comme le dit si bien l’écrivain de science fiction Alain Damasio, au lieu de rêver du grand soir, mieux vaut savoir bifurquer. Une attitude qui ouvre vers d’autres possibles collectifs, car une communauté intentionnelle s’est également envisager une autre façon de vivre socialement et politiquement ensemble. Je reçois, ce soir, à Mission encre noire, Gabrielle Anctil.
60 min
Mission encre noire 28 mars
Émission du 28 mars 2023
Mission encre noire Tome 37 chapitre 406. Jour encore, nuit à nouveau par Tristan Saule paru en 2023 aux éditions Le Quartanier dans la collection Parallèle Noir. Loïc ne sort plus de chez lui. Il scrute la place carrée par la lunette de sa carabine tchèque de calibre. 22. L'oeil collé au viseur, il observe la France déconfinée en mai 2020. Cela fait un an que Loïc n’a pas mis un pied dehors. Il voit bien la grande esplanade depuis son troisième étage du bâtiment B. Il n’en peut plus de se savoir menacé par le virus, les vaccins, les femmes, l’usine de métallurgie qui l’emploie. Heureusement il y a encore Nini, sa sœur qui est DRH chez Lapeyre, le spécialiste en menuiserie, elle lui fait ses courses. Sans oublier, Elora Silva, un des rares lien avec l’extérieur qui lui reste. Avec peut-être aussi quelques séances avec l’atelier de théâtre du quartier auquel il s’est inscrit. Il y retrouve Zineb et son délicat visage cerné par son hijab qu'il aime tant. Il va peu à peu perdre pied, être licencier, se couper de ses proches, entendre des voix, celles des personnages beckettiens de la pièce de théâtre qu’il écrit pour l’atelier, Clic et Cloque. Alors, il promène sa lunette de fusil vers la place, elle pointe vers son avenir, il a les larmes aux yeux. Roman sur la solitude, l’isolement, la difficulté de vivre le confinement, ce nouveau chapitre des Chroniques de la place carrée évoque le moisissement intérieur d’un homme et d’un monde ébranlé par la pandémie. Ce regard paranoïaque et menaçant qui balaie la place carrée se révèle un portrait frontal d’une France malade, qui a perdu ses repères. Nous embarquons ce soir pour ce thriller psychologique hypnotique en compagnie de Tristan Saule qui est notre invité à Mission encre noire.
60 min