Nouveau v379
Mission encre noire

Émission du 30 octobre 2018

Mission encre noire Tome 24 Chapitre 294. Thelma, Louise & Moi de Martine Delvaux paru en 2018 aux éditions Héliotrope. Le 24 mai 1991, Thelma & Louise sort en salle, Martine Delvaux fonds en larmes à la fin du film. La salle est vide. Son amie C. est assise sur le fauteuil à côté. La Thunderbird est figée au-dessus du Grand Canyon, encore et encore. Un arrêt sur image qui en dit long. B.B. King se lamente, lui aussi, Better not to look down. Visage défait, l'une et l'autre s'installent dans un restaurant du coin. On passe certainement Smells like Teen spirit ou l'Amour est sans pitié de Jean Leloup. L'autrice est en détresse. Ce film, quelque part, lui annonce un avenir plutôt sombre. Comment vivre dans ce monde qui menace tant les femmes ? Thelma & Louise a marqué sa vie, il y a 25 ans. Le film de Ridley Scott sur un scénario de Callie Khouri s'impose comme l'acte inaugural de changements profonds dans son quotidien et dans son envie d'écriture. Le futur sera féminin ou rien. Martine Delvaux part sur le pouce, en cavale, à la suite de Susan Sarandon et Geena Davies et intercalle des bouts d'elle, de sa vie au générique de son livre. Louise lui a laissé les clefs de la Thunderbird 1966 vert bouteille sur le volant, Thelma vous offre la place du passager, Martine Delvaux chauffe à Mission encre noire, elle vous parle d'amour, de féminisme, d'écriture et de votre/notre monde. Elle est notre invitée.  Extrait: «Je ne sais pas où va ce livre, mais ce que je sais, c'est que, même si c'est difficile, je me sens bien que quand je suis avec lui, assise devant l'écran comme Thelma et Louise devant les paysages grandioses du Nouveau-Mexique, entourées de rochers rouges escarpés, arbustes, poussières, amarante, escaliers de pierre sur fond de nuages blancs. Je ne suis bien qu'avec elles et dans les bras du film.» La maison mère d'Alexandre Soublière paru en 2018 aux éditions Boréal collection Liberté grande. L'auteur comme son père est beauceron, sa mère est originaire d'Ottawa. Tiraillé entre deux langues, il ne se sent vraiment chez lui, qu'au chalet familial, le juste milieu en quelque sorte. Pour raison professionnelle, il s'installe à Vancouver, après la parution de Charlotte before christ et Amanita Rosa. Pourtant Montréal lui manque. Pourquoi donc ? Tout en refusant de prendre position, Alexandre Soublière tient à son indépendance, ce départ va être l'occasion pour lui de questionner le lien qui unit sa génération à la culture canadienne-française des coureurs des bois. Qu'est-ce que cela veut dire être québécois aujourd'hui ? Saisi, comme par un coup vicieux de Jiu-jitsu, bien placé, page 82, l'auteur joint le geste à la parole, il confronte ses idées au fil d'une fiction invraisemblable. La province est plongée dans une panne de courant générale. Montréal se mue en un monde post-apocalyptique peuplé de rescapés et de rôdeurs. Essai ou fiction ? Le livre fait déjà couler beaucoup d'encre sur les réseaux sociaux. Alexandre Soublière est notre invité à Mission encre noire. Extrait: «À la lumière de ces réflexions et de ces lectures, une question me vient à l'esprit: si le français venait à disparaître au Québec demain matin, que nous resterait-il comme culture? La langue est importante pour nous, certes, mais le fait d'avoir bâti toute notre raison d'être autour d,elle a fait que nous avons peut-être négligé ce qui l'entoure. Le français devrait être autour d'elle a fait que nous avons peut-être une forteresse qui protège et solidifie notre culture, sans en être nécessairement le coeur. D'ailleurs, le fait que nous ayons été si centrés sur la langue au cours de notre courte histoire a probablement contribué à affaiblir cette même langue. Je m'explique: prenez un Québécois au hasard et demandez-lui de décrire les aspects spécifiques de son identité qui le distinguent du reste de l'Amérique du Nord, ou de la planète, sans avoir le droit de nommer la langue. Je serais prêt à parier qu'il ne saura pas quoi dire.»

Feuille de route

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Mission encre noire 27 juin
Émission du 27 juin 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 412. Troubles, nos ombres un collectif dirigé par Jennifer Bélanger paru en 2023 aux éditions Triptyque dans la collection Queer. La colère ne se tarit pas dixit l’autrice. De l’élaboration de ce projet à l’été 2020, à son achèvement en 2022, Safia Nolin deviendra la bête noire des réseaux sociaux malgré son récit d’agressions subies de la part de Maripier Morin, la montée de la droite aux États-Unis et celles des conservatismes en général dans le monde, dès lors menace les droits fondamentaux des personnes minorisées. Les textes réunis ici par Jennifer Bélanger offre un espace sécuritaire à 11 artistes non seulement pour témoigner de l’urgence de dire les dangers qui guettent les personnes LGBTQ2IA+, mais également pour nous partager des récits de vie poignants. Qu’il s’agisse d’amitié, de rapports amoureux, de désirs, de colère, de résistance, Étienne Bergeron, Julie Bosman, Marilou Craft, Nicholas Dawson, Martine Delvaux, Sandrine Galand, Maude Lafleur, Mael Maréchal, Roxane Nadeau, Mélanie O’Bomsawin et Justina Uribe se réunissent sous l’ombre lumineuse et créatrice de Jennifer Bélanger, qui est mon invité, ce soir, à Mission encre noire.
60 min
Mission encre noire 06 juin
Émission du 6 juin 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 411. Mise en forme par Mikella Nicol paru en 2023 aux éditions Le Cheval D’août. À la suite d’une rupture amoureuse encore fraîche et de l’aménagement en catastrophe chez un ami, la narratrice se jette à corps perdu dans l’entraînement physique. Malgré que son corps deviennent de plus en plus performant, la dépression gagne du terrain, il y a toujours quelque chose qui cloche. Ce qui s’impose très vite comme la seule activité encore valable à ses yeux va devenir un sujet de réflexion tenace. Et si, en dépit des injonctions bénéfiques assénées par les vidéos de fitness, les programmes de remises en forme n’étaient que la partie émergée d’une problématique plus vaste. Pour l’autrice l’idée jaillit en croisant un inconnu malveillant dans la rue. Le lien qui unit violence et beauté ne fait plus aucun doute. Ou comment l’industrie du fitness, entre autre, confirme la main mise d'une esthétique patriarcale, coloniale et fossile, sur le discours ambiant, dixit Paul B. Preciado. On peut se demander, ici, comment un tel système, qui vise la soumission collective totale des corps, se met-il en place ? Les femmes en particulier, tels des objets inoffensifs, se doivent de collaborer, bien entendu, à leur corps défendant, à des modèles hétérosexuels astreignants. Ce livre à mi-chemin de l’essai et du récit autobiographique laisse libre court à une parole qui refuse de rentrer dans le moule. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Mikella Nicol.
60 min
Mission encre noire 23 mai
Émission du 23 mai 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 410. Daniel Grenier Héroïnes et tombeaux paru en 2023 aux éditions Héliotrope. Alexandra Pearson, originaire du Tennessee, lit le New York Times dans cette ville secondaire brésilienne à l’ouest de Porto Alegre : Uruguaiana. Aujourd’hui journaliste, la jeune femme qui avait cheminé aux côté de Françoise dans le roman précédent de l’auteur, part à la recherche, cent ans plus tard, d’un étrange personnage, Ambrose Bierce, auteur du Dictionnaire du diable. Il serait mort fusillé en 1915 au Mexique et réapparu, bien vivant, à des milliers de kilomètres plus loin. Pour cela, elle devra mettre la main sur un manuscrit inédit. Pendant ce temps, comme l’annonce le journal, une certaine Helen Klaben décède à l’âge de 76 ans. Autrefois, elle a fait la Une du Life magazine, le 12 avril 1963, après avoir survécu 49 jours dans le froid du Yukon suite au crash de leur avion le 3 février 1963. Étrange coïncidence, ce nom, lui semble familier. Il lui remémore un souvenir amer, celui de Françoise, cette fille à qui elle n’a fait que mentir. À l’époque elle se faisait appeler Samantha. Dans ce troisième livre qui se veut un hommage à Ernesto Sabato, l’auteur nous entraîne dans un étrange roman d’aventures dans lequel il explore une fois encore le territoire américain et il s’interroge sur la responsabilité de celui qui raconte les histoires des autres. Sur un air de Carioca, j’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Daniel Grenier.
60 min
Mission encre noire 16 mai
Émission du 16 mai 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 409. Exercices de joie par Louise Dupré paru en 2023 aux éditions du Noroît. Dernier fascicule du triptyque traitant des possibilités du poétique face à l’horreur et à la détresse entamé avec Plus haut que les flammes en 2010 puis La main hantée en 2016, Exercices de joie présente la poète fébrile, les côtes friables, hantée par des rêves qui la réveillent la nuit. Toutefois Louise Dupré n'abdique pas pour autant. Elle revendique le désir de se tenir debout devant un paysage en ruines quitte à s'accrocher à ses mots comme à une bouée. Car, s'il est peut-être vain de vouloir comprendre l’envers du monde quand le temps fuit entre nos doigts, pourquoi ne pas apprivoiser les douleurs, en oublier la piqûre de l’aiguille. L’écriture, telle une veine fragile qui palpite encore, se mue en écorce revêche, pour combattre en prose et en vers. Si la suie de Birkenau ou de Auschwitz la poursuit encore, si l’ombre de la main coupable du second recueil habite encore les pages, les poèmes explorent ici une autre voie, plus apaisée. Celle de la douceur, celle de la joie, que l'autrice défini comme cet instant précieux et rare ou le cœur module ses élans. Il est du devoir de la poète de donner à voir cette faible clarté bienveillante qui conduit sa main. Certes, le cercle des poètes disparus s’agrandit un peu plus chaque jour, le monde chancelle ; non, elle ne vacillera pas ; l’autrice appartient à la généalogie des femmes qui n’ont jamais renoncé. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Louise Dupré.
60 min
Mission encre noire 02 mai
Émission du 2 mai 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 408. Le plein d’ordinaire par Étienne Tremblay paru en 2023 aux éditions Les Herbes Rouges. Asti qu’était belle! se dit Mathieu alors qu'il entre dans le Pétro sur le boulevard qui mène vers Longueuil, proche de l’usine Weston. Elle, c’est Val, sa future collègue que l’adolescent de Boucherville va chercher désespérément à séduire. Le futur cégépien est persuadé d’être promis à un grand destin de poète, cela sera-t-il suffisant pour elle? En attendant, il travaille de nuit dans une station-service à distance de vélo de chez lui. Une job parfaite qui lui permet de lire à sa guise, de consommer ses trois gammes de pot, de voler des cigarettes et de manger à volonté. Mathieu illustre à merveille la chronique ordinaire d’un ados de banlieue des années 2000. Une jeunesse qui se mélange, qui se passionne, qui se voit un avenir exceptionnel, qui rêve la vie en grand plutôt qu’à travers le miroir aveugle de l’écran noir d’un cellulaire. Mathieu n’a rien de différent des autres, si ce n’est l’élan que lui procure une sensibilité exacerbée et un certain goût du risque. Des excès qui fatalement se fracasseront contre le mur des réalités. Voici un roman initiatique qui relate l’aventure épisodique, très attachante, d’un jeune homme en quête de lui-même, pris au centre de son univers sensible, près à devenir un autre Mathieu, même s'il ne sait pas très bien encore à quoi cela ressemblera. J’accueille, ce soir à Mission encre noire, Étienne Tremblay.
60 min